Quand un fonctionnaire français devient simplement par sa parole un assassin, comme un kapo de camp de concentration nazi, par non assistance à personne en danger : 27 migrants kurdes iraniens et irakiens meurent noyés au large de Calais, dont six femmes et une fillette ; il n’y aura que deux survivants.
Euh, on vient de passer à côté de, euh, des migrants, euh enfin, des cadavres. Ils sont morts. D’accord monsieur, donc les migrants sont dans une embarcation ? Ils vous semblent delta charlie delta [décédés] ? Non non non. Ils sont dans l’eau, ils sont dans l’eau mais, euh, ils sont morts.
13 h 49′. échange radio entre le patron pêcheur du bateau Saint-Jacques 2 et le centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage maritimes (Cross) Gris-Nez (Pas-de-Calais), composé de militaires et sous l’autorité du préfet maritime de la Manche et la mer du Nord.
Peu avant le drame, ils avaient donné leur position au Cross, qui leur avait répondu : vous êtes dans des eaux anglaises, nous ne pouvons rien pour vous !
Douze précieuses heures se sont écoulées entre le premier appel au secours passé ce 24 novembre 2021 par les 33 migrants en détresse sur un canot pneumatique dégonflé au beau milieu de la Manche et la découverte de 15 corps de naufragés par un bateau de pêche passé par hasard dans la zone.
Entre temps, une quinzaine de coups de fils passés par les passagers de l’embarcation de fortune n’auront pas suffi à faire déplacer une équipe de sauvetage française sur les lieux du drame, situé à la frontière entre les eaux territoriales avec les eaux britanniques.
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Un an après ce naufrage, le plus grave jamais survenu dans la Manche, une enquête judiciaire dont Le Monde a publié des éléments dans son édition du dimanche 13 novembre, révèle pour la première fois de graves dysfonctionnements côté français dans le sauvetage de ces personnes.
Avant de mourir noyés, les passagers du canot ont appelé au secours de très nombreuses fois le centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage maritimes (Cross) Gris-Nez (Pas-de-Calais), qui dépend de la préfecture maritime de la Manche et la mer du Nord. Mais aucun bateau de sauvetage ne leur a été envoyé.
Au total, quelque 27 personnes, dont sept femme, un adolescent de 16 ans et une enfant de 7 ans, ont péri dans ce drame, quatre sont toujours portées disparues et deux migrants ont survécu. Ces deux survivants, un Kurde iranien et un Soudanais, ont raconté aux enquêteurs que leur canot, parti d’une plage à proximité de Dunkerque, avait commencé à se dégonfler et à couler quelques heures après le départ.
En théorie, une embarcation de migrants est presque toujours considérée comme étant en détresse, avait expliqué la préfecture de la Manche et de la mer du Nord à Info Migrants dans un article de 2020, qui faisait le point sur l’organisation des secours dans la Manche.
En effet, cette zone maritime très étroite – 50 kilomètres seulement séparent Calais de la côte anglaise la plus proche – est souvent malmenée par les courants. Les canots pneumatiques empruntés par les migrants sont susceptibles de se perdre, d’être percutés par un cargo ou de tomber en panne. D’autant que les embarcations utilisées sont souvent surchargées, avec des passagers en état d’hypothermie sévère en raison des conditions météorologiques difficiles. Dans la majorité des cas, le sauvetage se justifie. On ne laisse donc pas un canot naviguer vers les côtes anglaises.
Alors que s’est-il passé cette nuit du 24 novembre 2021 ? L’audition des opérateurs du Cross par les enquêteurs laisse penser que les personnes qui ont réceptionné les appels des migrants en détresse ne semblent pas avoir pris la mesure du danger qu’encourraient les passagers du canot. Pire, elles font parfois preuve de moqueries dans des commentaires en aparté, enregistrés dans les bandes de conversation entre le Cross et le bateau de migrants.
Interrogés par la section de recherche de la gendarmerie maritime de Cherbourg (Manche), plusieurs membres du Cross estiment que souvent les migrants appellent et crient au danger alors qu’ils n’ont rien. Le Monde cite, entre autres, Nicolas H., le chef du service opération : Ils [les migrants en mer] nous appellent tous, même s’ils ne sont pas en difficulté (…) Il est très délicat de prioriser correctement.
Nous n’avions pas d’inquiétude concernant [l’embarcation naufragée], reconnaît quant à elle la cheffe de quart Pauline M. D’autant que le service a été débordé d’appels provenant d’une vingtaine d’embarcations de migrants cette même nuit, rapporte le Cross.
Il peut arriver aussi qu’une embarcation en détresse soit prioritaire sur une autre. Dans ce cas, quand nous ne pouvons pas être sur tous les fronts, nous prévenons les autorités anglaises. Nous leur expliquons que nous devons agir autre part, pour un cas plus urgent. Ils se chargent alors d’intervenir, expliquait la préfecture de la Manche et de la mer du Nord à Info Migrants en 2020.
Est-ce cela qui s’est passé cette nuit-là ? La transcription brute des conversations téléphoniques entre le Cross et l’embarcation naufragée, dont Le Monde se fait l’écho, montre que le Cross a passé le relai aux autorités britanniques assez rapidement, vers 2h du matin, dès les premiers contacts avec les passagers du navire en détresse. J’ai un canot à côté de votre secteur. Je vous donnerai sa position car c’est à 0,6 mile nautique [965 mètres des eaux anglaises], dit l’opératrice du Cross au centre de coordination des secours anglais, à Douvres. S’en suivent de nombreux appels aux secours français, qui considèrent désormais que les naufragés ne relèvent plus de leur responsabilité.
Le Monde rapporte notamment qu’à 3h30, le Cross reçoit un appel d’un passager qui explique qu’il est littéralement dans l’eau, ce à quoi l’opérateur répond : Oui, mais vous êtes dans les eaux anglaises. Et encore, en aparté, en off : Je vais lui sortir la phrase magique, pas de position [GPS], pas de bateau de secours. Ou encore : Ah bah t’entends pas, tu seras pas sauvé. J’ai les pieds dans l’eau, bah… je t’ai pas demandé de partir.
Côté britannique, l’enquête ne dit pas encore comment les secours ont géré cette intervention. Il semblerait toutefois qu’ils aient, à leur tour, délégué la tâche aux Français si l’on en croit le témoignage de l’un des survivants, Ahmad Shexa. Lors de son audition en garde à vue, ce jeune Irakien a rapporté que les secours anglais leur avaient indiqué que le temps qu’ils arrivent sur place, les vagues nous auraient menés dans les eaux territoriales françaises, et donc ils ne sont pas venus.
À la suite de ces révélations, la Cimade, association de soutien aux migrants et réfugiés, a fait part de sa consternation de voir qu’il y a eu beaucoup d’énergie donnée par les deux côtés, français et britannique, pour démontrer que c’était à l’autre partie de prendre en charge le secours et le sauvetage.
On est horrifiés, a estimé pour sa part Delphine Rouilleault, directrice générale de France Terre d’Asile. Ce que cela décrit, c’est l’absence complète de coordination des opérations de sauvetage en mer et leur banalisation, qui fait que personne n’a pris la mesure du danger pour les personnes.
Comme toute mer, la Manche est divisée en plusieurs zones administratives : les eaux territoriales françaises et les eaux territoriales anglaises. Entre les côtes du Calaisis et Douvres, ces deux zones se touchent. Chaque pays est souverain de son espace maritime. La France surveille et intervient donc dans sa zone et la Grande-Bretagne dans la sienne. Mais, si, pour diverses raisons, la force anglaise ne peut pas mener une opération de secours, elle peut demander aux Français d’intervenir à leur place. Et donc d’entrer dans les eaux anglaises, avait pourtant expliqué la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord à Info Migrants.
On savait malheureusement qu’un jour cela arriverait, confie l’un des membres du Cross aux enquêteurs. Ça fait deux ans que nous demandons des moyens supplémentaires, ajoute l’un de ses collègues. Pour mener à bien les opérations de sauvetage, les personnes interrogées expliquent qu’il faudrait davantage de moyens. Or ils ne disposaient que de deux moyens nautiques et un moyen aérien au moment des faits.
Des chiffres inquiétant au regard de l’ampleur du nombre de tentatives de traversées de la Manche, sachant que depuis le début de l’année, celles-ci ont encore augmenté et battu tous les records, avec 40 000 passages vers le Royaume-Uni selon le ministère de la Défense britannique.
Info Migrants 14 11 2022
En mai 2023, cinq militaires français seront mis en examen pour non-assistance à personne en danger.
25 11 2021
Le général de police Ahmed Naser Al Raisi, des Émirats Arabes unis, contre lequel ont été déposés plusieurs plaintes pour torture, est élu Président d’Interpol ! Et nous acceptons que des règlements intérieurs de grandes organisations internationales autorisent cela !
28 11 2021
Une histoire du quotidien. Seul le prénom a été changé. Christine, dans les soixante-cinq ans, revient des obsèques de son fils, 48 ans, qui s’est pendu. Elle n’est pas repartie chez elle, mais chez sa mère qui approche les 100 ans, en compagnie de sa sœur, 101 ans, dans un village proche d’Orléans. Elle croise la voisine, qu’elle connait bien et, ne tenant pas à ce qu’elle apprenne ce décès par sa mère, l’en informe directement ; celle-ci, un peu dure de la feuille, comprend que c’est la mère de Christine qui est morte : aussi Christine la reprend : Ce n’est pas ma mère qui est morte, c’est mon fils.
Ah, c’est ton fils ! Eh bien, ça me rassure.
6 12 2021
Sur l’île grecque de Lesbos, dans le camp de réfugiés de Mavrovouni, le pape François fustige l’ensemble des pays d’Europe pour la mauvaise qualité de l’accueil qu »ils réservent aux réfugiés. Et il n’a pas un mot contre les premiers responsables de ce drame, les trop nombreux pays d’Afrique dirigés par des despotes, monstres de dictature criminelle, monstres d’indécrottable corruption, pays d’origine de tous ces réfugiés qui n’en peuvent plus de vivre dans ces conditions et émigrent pour retrouver liberté et dignité dans un pays d’Europe, au risque de leur vie. Pas un mot. Mais de qui se moque-t-il donc, ce pape pour se montrer aussi profondément malhonnête ? Car la négation de la réalité politique de ce drame est une vraie malhonnêteté. Pendant des décennies nos intellectuels, toutes orientations confondues, n’ont eu de cesse de fustiger le quasi silence de Pie XII sur l’holocauste, et aujourd’hui, le pape François se met exactement dans ses pas en se refusant à dénoncer les régimes pourris qui poussent les gens à fuir leur pays, et personne ne dit rien ! Nous préférons suivre ce pape jésuite en pratiquant l’auto-flagellation, fruit de notre masochisme. Serions-nous nous aussi devenus somnambules ? Les intellectuels qui ne cessaient de dire leur indignation sur les silences de Pie XII observent aujourd’hui un silence assourdissant. Qu’est-ce que cela signifie ?
10 12 2021
Une série de tornades tue 93 personnes aux États-Unis, sur cinq états autour du Kentucky. Des spécialistes diront qu’on a pu voir un rouleau de moquette monter jusqu’à 11 000 mètres d’altitude avant de retomber !
20 12 2021
Tom Phillips, 34 ans, habitant Marokopa, sur la côte est de l’île du Nord de la Nouvelle Zélande, se dispute avec sa femme et s’en va en emmenant ses trois enfants – Mavérick, le garçon de 8 ans, Jayda et Ember, ses filles de 6 et 5 ans. Ils disparaissent dans la nature en se montrant de temps à autre sur des caméras dans des villes où ils viennent voler ce qu’il faut pour vivre. Le 3 octobre 2024 deux jeunes chasseurs les filmeront dans une brousse montagneuse. Mais, malgré une prime de 80 000 $ – 45 000 € -, personne ne parviendra à leur mettre la main dessus. Selon la police, il bénéficierait d’une aide de quelques membres de sa famille.
25 12 2021
Ariane 5 emmène dans l’espace le télescope spatial James Webb sur lequel des centaines d’hommes travaillent depuis trente ans.
Trois décennies de développements et de tests en laboratoire, des milliers de scientifiques et d’ingénieurs impliqués, une enveloppe globale flirtant avec les 10 milliards $ … C’est peu dire que d’exceptionnelles ressources auront été nécessaires pour concevoir le télescope spatial James Webb (JWST selon l’acronyme anglais), qui n’est rien moins que le plus gros et le plus puissant engin d’observation jamais envoyé dans l’espace. Après de nombreux reports et des années de retard sur le calendrier – le lancement était initialement prévu en … 2008 ! – tous les voyants sont enfin au vert: en cette fin 2021, ce monstre de 22 mètres d’envergure (aussi grand qu’un terrain de tennis) échafaudé par la NASA, l’agence spatiale américaine, avec la collaboration des agences spatiales européennes (ESA) et canadienne (ESC), va être enfin envoyé dans l’espace. Il a quitté fin septembre les installations de l’équipementier américain américain Northrop Grumann, en Californie où d’ultimes opérations de contrôle ont été effectuées. Emmailloté dans un conteneur de 30 mètres de long et acheminé par voie maritime, il a longé les côtes du Mexique et transité par le canal de Panama avant de rejoindre le Centre Spatial guyanais le 12 octobre. Les équipes de l’ESA et d’Arianespace s’affairent, depuis lors, à intégrer l’imposante mais délicate machine sous la coiffe d’un lanceur Ariane 5. Si tout se passe comme prévu, elle s’envolera le 18 décembre de Kourou pour rallier sa place de parking : une région de l’espace située à 1.5 millions de kilomètres de notre planète, soit 4 fois la distance Terre-Lune. L’émotion est immense à l’approche de la date fatidique, aboutissement de tant d’efforts et d’années de recherche, confie Pierre Olivier Lagage, astrophysicien au CEA à Orsay (Essonne), qui supervise l’un des appareils de détection du JWST. Mais c’est surtout une prodigieuse aventure scientifique qui commence. Car ce télescope va ouvrir une fenêtre inédite sur l’Univers : ses prémices et les différentes phases de son évolution comme ses objets les plus intrigants. Grâce à cette machine révolutionnaire, les connaissances en astronomie feront d’ici peu un bond en avant.
Les réflexions qui conduiront à la fabrication du JWST ont été amorcées dès 1989 par la Nasa, soit même un an avant le lancement du télescope spatial Hubble. À l’époque, il s’agissait déjà, pour les astronomes, d’identifier les grandes problématiques face auxquelles ce dernier ne pourrait que buter. L’une des plus importantes concernait la fin des âges sombres de l’Univers et l’allumage des premières étoiles, conduisant elles-mêmes à la structuration des premières galaxies. Ces étapes fondamentales seraient intervenues au cours des premières centaines de millions d’années qui ont suivi le Big Bang il y a 13.8 milliards d’années. Mais en raison de l’expansion de l’Univers, la lumière des étoiles primordiales a été progressivement décalée vers l’infrarouge – une gamme de rayonnements invisibles par l’œil humain dont les longueurs d’onde sont supérieures à 0.7 micromètre. Or, la majeure partie des ces rayonnements est absorbée par l’atmosphère de notre planète, ses molécules d’eau en particulier, ce qui limite très fortement les observations au sol, relève Pierre Olivier Lagage. Le vénérable Hubble – qui est toujours en activité et aura permis des découvertes capitales sur l’âge de l’Univers, la diversité des galaxies ou encore la structure des trous noirs – n’en détecte lui-même qu’une petite fraction. Car même si cet observatoire orbite à 570 kilomètres de la Terre, il a été optimisé pour scruter l’Univers dans les longueurs d’onde de la lumière visible et ultraviolette (entre 0.1 et 0.7 micromètre). D’où la nécessité pour remonter le temps, voir plus loin que Hubble et contempler la naissance des premières étoiles et galaxies, de fabriquer un télescope spatial spécialement adapté aux observations infrarouges.
Celles-ci sont néanmoins difficiles à réaliser et requièrent de lourds dispositifs. Tous les corps qui génèrent de la chaleur émettent aussi des rayonnements infrarouges, explique Pierre Olivier Lagage. À commencer par le soleil et la terre, qui pourraient aveugler le télescope. Mais, aussi, l’observatoire lui-même ! Il doit donc être refroidi à très basse température, sans quoi il observerait ses propres émissions infrarouges. C’est pour cette raison que le futur observatoire spatial, dénommé d’abord New Generation Space Telescope avant d’être rebaptisé en 2002 James Webb Space Telescope – sera satellisé à 1.5 million de kilomètres autour d’une zone que les astronomes appellent point de Lagrange L 2. Le principal avantage de cet emplacement est qu’il est situé en permanence dans l’axe Soleil-Terre de l’autre côté de celle-ci. Les sources de chaleur et de rayonnement parasités viendront donc toujours d’une seule direction. Le JWST pourra ainsi s’en prémunir en s’abritant derrière un gigantesque parasol, tout en examinant l’Univers dans la direction opposée.
En forme de losange, ce bouclier thermique présente une surface protectrice de 150 mètres carrés. Il est constitué de cinq couches de polymères métallisés qui réfléchissent les rayonnements extérieurs et seront séparés par du vide conduisant très peu la chaleur. Elle se comporteront un peu comme des couvertures de survie qui maintiendront la machine dans le noir et le froid de l’espace, détaille Pierre Olivier Lagage. Côté soleil, la température du parasol s’élèvera ainsi à 85°… mais chutera à – 233°C à l’autre extrémité ! Grâce à ce système de refroidissement passif, trois des quatre instruments opérant dans le proche infrarouge (jusqu »à 5.3 micromètres) pourront parfaitement fonctionner : la caméra NIRCam (Near-InfraRed Camera) fournie par l’Université de l’Arizona (États-Unis) ; l’imageur NIRIS (Near InfraRed Imaginerand Stitless Spectrograph) fabriqué au Canada ; et le spectromètre NIRSpec (Near-InfraRed Spectrometer)) développé par l’ESA.
Mais le quatrième instrument, MIRI (Mid InfraRed Instrument), exige encore un système de refroidissement additionnel. Fabriqué par la NASA et l’ESA ainsi qu’un consortium d’Instituts européens (notamment le CEA, l’observatoire de Paris et le Laboratoire d’Astrophysique de Marseille), il est le seul qui inspectera l’Univers dans l’Infrarouge moyen, jusqu’à 80 micromètres. Plus on souhaite détecter des rayonnements de grande longueur d’onde, plus il faut refroidir l’appareil, indique Pierre Olivier Lagage, coresponsable de MIRI. L’instrument sera ainsi équipé d’une sorte de super-réfrigérateur : un dispositif utilisant des fluides cryogéniques, d’un mètre cube environ, qui abaissera la température à – 264°C, soit seulement 7° C au-dessus du zéro absolu !
La partie optique du JWST a constitué un autre défi technologique majeur. Les lueurs émises par les étoiles primitives sont si faibles qu’elles nécessitent une très grande surface de collecte, souligne Pierre Ferruit, responsable scientifique du JWST pour l’ESA. Le miroir principal du télescope (il possède aussi un miroir secondaire, plus petit, qui concentre la lumière du premier) mesure 6.5 mètres de diamètre, contre 2.4 mètres pour Hubble. Un tel gabarit permettra de capter un maximum de photons infrarouges et d’obtenir une très bonne résolution spatiale, donc des images d’excellente qualité, se réjouit l’astronome. Ce miroir est formé de 18 éléments hexagonaux composés eux-mêmes de béryllium et recouverts d’or, métal qui réfléchit très bien la lumière infrarouge. Même si la surface totale avoisine les 25 mètres carrés, les pellicules d’or sont très fines et correspondent dans leur ensemble à une balle de golf. Semblable à un tournesol géant, cette structure dorée et alvéolaire est devenue la signature du JWST, constate Pierre Ferruit. Elle permettra surtout au futur télescope d’être de dix à cent fois plus performant que tout ce qui existe dans le domaine de la détection infrarouge.
Grâce à cet œil surpuissant, et outre l’éclat des astres primordiaux, le Webb pourra observer ce qui se trame derrière les épais nuages de poussières et de gaz qui donnent naissance aux étoiles. Il auscultera aussi les processus de formation planétaire, découvrira une pléiade d’objets aussi lointains que peu lumineux. Le JWSR pourra même analyser l’atmosphère des exoplanètes (planètes extrasolaires), en y détectant peut-être des biosignatures comme des molécules d’ozone.
Dernier défi : trouver un moyen de propulser le JWST dans l’espace. En effet aucun lanceur n’est assez spacieux pour accueillir un tel mastodonte. Aussi la Nasa a confié son lancement à l’une des plus grandes fusée en service : l’européenne Ariane V. Elle a été choisie à la fois pour sa très grande coiffe et son excellente fiabilité, confirme Daniel de Chambure, responsable de l’exploitation et l’adaptation des missions de l’ESA avec Ariane V. Mais même dans ses soutes, le JWST devra être lancé plié tel un origami géant, en trois parties pour le miroir. Recroquevillé de la sorte, le télescope atteint les capacités maximales du lanceur. Nous avons utilisé pour la première fois un ensemble de laser avec une précision inférieure au millimètre, explique Daniel de Chambrun. Et d’éviter ainsi le moindre contact avec le télescope. Les opérations de préparation pour la lancement à Kourou prendront 545 jours, deux fois plus que pour les satellites ordinaires. Nous les anticipons et les affinons depuis plus de dix ans fait remarquer l’ingénieur.
Les mécanismes de repliement et de déploiement, inédits par leur nombre et leur ampleur, auront nécessité eux aussi une multitude de travaux et de tests. Sans compet les essais concernant les optiques, le dispositif cryogénique ou les appareils de détection. Ils ont été soumis à d’intenses vibrations afin d’éprouver leur résistance au décollage, expérimentés dans d’immenses chambres à vide reproduisant les conditions dans l’espace. Cette complexité explique, en grande partie, les péripéties et ajournements successifs du JWST pendant plus de dix ans. Il s’agit toutefois d’un projet hors norme dont les composantes ont toutes été testées avec une rigueur exemplaire, une infinie minutie, justifie Pierre Ferruit. Car une fois que ce concentré de technologie sera satellisé à 1.5 million de kilomètres, aucun dépannage ne sera a priori possible. Aucun astronaute ne pourra se rendre sur place et intervenir, contrairement à Hubble qui a été réparé une demi-douzaine de fois.
Après le décollage d’Ariane V, il faudra attendre 27 minutes pour que le JWST se sépara des derniers éléments de la fusée à 1 500 kilomètres d’altitude. Le télescope commencera alors son transit, qui durera environ quatre semaines, vers le point de Lagrange L 2, précise Daniel de Chambure. C’est au cours de ce voyage que la machine se dépliera peu à peu. Telle une chrysalide muant progressivement en papillon, elle dépliera d’abord ses panneaux solaires ainsi que ses antennes afin de disposer d’une source d’énergie électrique et communiquer avec le centre de contrôle de Baltimore (États-Unis). Puis les cinq couches du bouclier thermique seront déroulées et séparées les une des autres. Le miroir secondaire se positionnera ensuite face au miroir principal [qui sera déployé le 8 janvier] avant que les ailes latérales de celui-ci se déplient et soient verrouillées. Cette succession d’étapes, qui fera intervenir près de 200 mécanismes, promet quelques nuits stressantes et un très long suspense ! augure Pierre Olivier Lagage. Sans compter qu’il faudra encore attendre quatre à cinq mois, une fois que l’engin sera mis en orbite, [ orbite atteinte le 25 janvier 2022] pour que le télescope et ses instruments soient pleinement opérationnels. Ainsi, les premières observations du ciel ne débuteront pas avant juin ou juillet 2022. Mais les attentes, énormes, sont à la hauteur des enjeux scientifiques, s’enflamme Pierre Feruit. Le JWST dégage en effet un immense espace de découvertes, dans tous les domaines de l’astrophysique, qui devraient être plus déterminantes encore que ce que Hubble a produit.
F Daninos. Science et Avenir. n° 898 Décembre 2021
L’étoile 2MASS J17554042+6551277 vue par le télescope spatial James-Webb, à l’issue des procédures d’alignement de son miroir principal, le 15 mars 2022. STSCI/NASA
2021
Peut-être une des dernières réalisations de Prométhée, mais quel exploit : de la Chine au Pakistan, 3 ans de travaux pour un coût de 65 milliards $ ! waouh ! Et Zaha Hadid, incontournable.
Aéroport de Pékin Daxing
Aéroport de Pékin Daxing par Zaha Haddid
Aéroport de Pékin Daxing
En Finlande le chantier naval Nautor Swan, avec comme architecte Juan Kouyoumdjian, met à l’eau Skorpios, 42.5 de long, le plus grand monocoque de course dont le propriétaire est le milliardaire russe Dmitri Ribolovlev, propriétaire entre autres de l’AS Monaco.
4 01 2022
Les non-vaccinés, j’ai très envie de les emmerder. Et donc on va continuer de le faire, jusqu’au bout. C’est ça, la stratégie. Quelques jours plus tôt, Emmanuel Macron affirmait que la vaccination ne serait pas obligatoire. Comprenne qui pourra… le fameux en même temps et en même temps n’est rien d’autre que tout et son contraire. Une structure mentale de bonimenteur de foire.
Emmanuel Macron, interview accordée au Parisien.
15 01 2022
Dans les eaux des îles Tonga, explosion sous -marine du volcan Hunga Tonga-Hunga Ha’apai. Juste avant l’explosion, un signal sismique a été capté. Il s’agit d’une onde de Rayleigh, repérée par deux stations éloignées, à Fidji et Futuna, à plus de 750 kilomètres de là. Cette éruption a un indice VEI-5 et crache environ 10 kilomètres cubes de matière volcanique. Les tsunamis qui ont suivi ont causé la mort d’au moins quatre personnes aux Tonga et deux autres au Pérou, situé à 10 000 km ! Les cendres ont recouvert des îles entières, contaminant l’eau potable et forçant des milliers de personnes à fuir. Un énorme panache de cendres et gaz a atteint plus de 30 kilomètres dans le ciel. Des vagues de tsunami se sont abattues sur plusieurs pays comme la Nouvelle-Zélande, le Japon ou encore les États-Unis.
L’éruption a injecté quelque 150 millions de tonnes de vapeur d’eau dans la stratosphère, modifiant ainsi la chimie atmosphérique. Cela a accéléré la formation d’aérosols sulfatiques trois fois plus vite que d’habitude et réduit l’ozone jusqu’à 30 % dans les zones touchées par le panache. Cet événement aurait contribué aux records mondiaux de température en 2022. Les données sismiques liées à l’onde de Rayleigh ont été étudiées dans Geophysical Research Letters et les Proceedings of the National Academy of Sciences.
17 01 2022
Exploit norvégien à Wengen en slalom, qui se court en 2 manches : ne sont sélectionnés pour la 2° manche que les 30 premiers de la première et pour la seconde l’ordre de départ est l’inverse du classement de la 1° manche : le 30° de la 1° manche part 1° de la deuxième manche, ce qui représente un avantage le plus souvent car la piste n’a pas encore été creusée surtout si la neige n’est pas très dure. Lucas Braathen est arrivé 29 ° de la 1° manche : il a donc frôlé l’élimination, à 2″04 du premier, son compatriote Henrik Khristoffersen. Et il gagne la 2° manche en mettant le second à 0″97. Une remontada de 28 places ! Du jamais vu en slalom. Le garçon revient de loin : gravement blessé il y a un peu plus d’un an, il avait du laisser les skis au garage pendant deux mois !
Ce record de nombre de places remontées tiendra jusqu’au 4 février 2024, quand, à Chamonix-Les Houches, le Suisse Daniel Yule arrivé dans la première manche du slalom dernier des sélectionnés pour la deuxième manche gagnera cette 2° manche et la victoire en remontant 29 places !
Ces procédures d’ordre de départ d’une 2° manche donnent lieu à des situations amusantes dans les commentaires de course ! Tant que les derniers à se lancer – qui sont les meilleurs slalomeurs du monde, ne sont pas partis, les commentateurs se retiennent, s’attendant à ce que le passage disons des cinq derniers vienne bousculer les résultats de la course. Et c’est bien ainsi que se passent les choses, le plus souvent ; mais cette fois-ci, à Wengen, cela n’a pas été le cas : le norvégien Lucas Braathen, parti deuxième a fait une manche fabuleuse, et les commentateurs, pour s’en apercevoir, ont du attendre la fin de la course pour réaliser que personne ne ferait mieux ; décalage entre la réalité de l’exploit et les commentaires qui ne le voient pas dans le temps où il se déroule. Seul un skieur sait voir cela et, en l’occurrence, c’était Muffat-Jeandet, blessé sur son lit d’hôpital avec un fracture du péroné.
Le garçon n’a pas fini de faire parler de lui. Il remportera le globe de slalom spécial 2023, mais, s’estimant gêné dans sa liberté de manœuvre par sa fédération, il prendra une retraite anticipée dès l’automne 2023… des histoires de sponsors… auxquelles il mettra fin en annonçant son retour à la compétition pour la saison 2024/2025 …. sous les couleurs du Brésil. En octobre/novembre 2024, il finira les deux premiers slaloms dans les 5 premiers : chapeau l’artiste ! On va danser la samba !
18 01 2022
Charles Dubouloz, 32 ans, sort de la voie Rolling Stone dans la face nord des Grandes Jorasses, dans le massif du Mont Blanc après 6 jours et cinq nuits en solitaire. Un sac de 35 kilos. 1/2 litre d’eau par jour. Il aura maigri d’un kilo par jour, le corps se refusant à avaler quoi que ce soit. Une température qui peut descendre à – 30°. Un très très grand exploit, en escalade classique : il laisse son sac, grimpe en s’encordant aussi longtemps que le permet la longueur de la corde, ce qui signifie grande consommation de pitons, mousquetons, broches à glace, coins et même échelle d’artificiel, puis redescend, fait monter son sac et remonte en étant assuré et en déséquipant autant que possible … et ainsi de suite jusqu’au sommet ; bien sur il peut toujours y avoir un accident mais c’est sans comparaison possible avec les risques du free – sans assurance -. L’inconvénient c’est que c’est beaucoup plus long, et donc cela suppose une résistance physique hors du commun.
et, un an plus tard, ce sera la directissime de la pointe Walker, avec Symon Welfringer et Clovis Paulin , du 9 au 13 février 2023
25 01 2022
Victor Castanet, journaliste free-lance, sort en librairie Les Fossoyeurs. Il a fréquenté pendant trois ans les coulisses des Bords de Seine, un EPHAD de grand luxe – 6 500 €/mois – du très grand et puissant groupe Orpea, [372 établissements en France dont une majorité de maisons de retraite, 1 200 établissements dans 23 pays employant 65 000 personnes] relatant avec précision les conditions de la mort de Françoise Dorin. Et tout cela est un scandale… scandale qu’une société privée fasse des bénéfices importants par pure maltraitance de ses clients, avec du personnel non formé et donc mal payé, scandale que l’État n’exerce pas sa tutelle avec efficacité. Au cœur du scandale, Xavier Bertrand, plusieurs fois ministre – Santé, puis Travail sous Sarkozy – quand fleurissaient les EPHAD comme primevères au printemps, et comme cul et chemise avec les dirigeants d’Orpea. À mi-chemin de son enquête, il se verra proposer 15 millions € pour y mettre fin et ne rien publier ! Quelques heures après la parution du Monde donnant des extraits du livre, le titre boursier d’Orpea plongera de 16 % avant d’être retiré de la cotation. Mais, pour Yves Le Masne, patron d’Orpea, ce n’est pas grave : sitôt connu le projet de livre de Victor Castanet, en juillet 2020, il s’était empressé de vendre 588 000 € d’actions, une bonne affaire et de toutes façons, avec un salaire mensuel de 100 000 €, il peut rester à ne rien faire pendant un bon bout de temps, surtout avec en plus une prime de départ de 2.6 millions €. Si Valérie Pécresse ne veut pas dégringoler dans les sondages, il va lui falloir se débarrasser de cette casserole qu’est Xavier Bertrand au plus vite. Il n’y a pas un scandale, mais deux, car Orpea n’est pas libre de tous ses mouvements : remplissant une mission de service publique, elle est sous tutelle de l’État, en l’occurrence le ministre de la Santé, via probablement ses délégations régionales, les ARS – Agences Régionales de Santé -. Qu’a fait cette tutelle ? Des inspections, suivies de rapport. Et une fois le rapport fait, qui est en charge de vérifier l’application de ses recommandations ? Lors de ces inspections, personne n’aurait donc jamais vu un cas de maltraitance …. seul Victor Castanet aurait vu quelque chose… allons, allons, ce n’est que la république des copains et des coquins, dans laquelle le bien commun, en l’occurrence celui des usagers ne compte pour rien. On sait, on voit mais on ne dit rien, surtout pas de vague, parce que de toutes façons on sait très bien que les victimes seront les dernières à venir se plaindre, voire à manifester, n’est ce pas, papy, n’est ce pas mamy, qu’on ne vous verra jamais manifester dans la rue ? Fonctionnaires voyous de corruption passive, qu’il faudrait traduire devant les tribunaux pour non-assistance à personne en danger.
La Gazette de Montpellier (n° 1755) interview Johanna Souil, directrice de l’Ehpad associatif Le Foyer des Romarins à Clapiers, banlieue de Montpellier, et auparavant assistante de direction de 2008 à 2011 à l’Ehpad de Courbevoie qui la licenciera en 2011.
Il y a bien des contrôles pourtant …
Quand on est audité, on sait qu’on va l’être. On prépare un seul dossier de salarié. Et quand l’auditeur vient, il vous demande celui-là et pas un autre. Même quand c’était des contrôles externes, tout le monde se connaissait, et on le savait à l’avance.
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Les sociétés traditionnelle sont des sociétés qui adorent la vieillesse car, précisément, ce sont des sociétés où le passé est la source du sens. Dès lors que le passé est la source du sens, tous ceux qui sont les proches du passé, autrement dit les vieux, sont valorisés. Ce sont des sociétés de l’imitation, de l’héritage, de la répétition.
Nos sociétés, elles, sont des sociétés de l’innovation : d’une certaine façon, le futur est la source du sens. C’est ce vers quoi l’on tend qui structure notre société, pour le meilleur comme pour le pire d’ailleurs. Dans cette société-là, les jeunes et les enfants sont valorisés car ils incarnent le futur dans le présent.
Pierre-Henri Tavoillot. Le Figaro du 20 juin 2022
3 02 2022
Elon Musk a lancé le projet Starlink par lequel il veut installer sur une orbite basse des satellites par milliers pour permettre à tous les habitants du monde de bénéficier d’Internet. 12 000 satellites prévus à l’horizon 2025, qui pourraient ensuite passer à 42 000. Au 1° novembre 2024, on comptera 4 626 satellites déjà en service autour de la terre.
Le satellite, qui circule sur une orbite circulaire à une altitude d’environ 550 kilomètres, a une masse approximative de moins de 300 kilogrammes et dispose d’un moteur ionique pour atteindre et maintenir sa position sur son orbite et réduire celle-ci en fin de vie (environ 6 ans) afin d’être détruit par sa rentrée atmosphérique.
Wikipedia
Problème : la météo dans l’espace : une tempête solaire, ça n’arrange pas les choses :
40 des 49 satellites lancés par Space X n’atteindront jamais leur destination à cause d’une tempête solaire. C’est la première fois que la constellation Starlink est impactée par un tel événement.
Le 29 janvier 2022, une importante éruption solaire, également connue sous le nom d’éjection de masse coronale, a été détectée à la surface de notre étoile. Cette éjection est parvenue jusqu’à la Terre aux alentours du 2 février, entraînant une tempête géomagnétique. La majorité des satellites envoyés par SpaceX en orbite basse le 3 février n’ont malheureusement pas pu échapper aux répercussions de ce phénomène.
En effet, les tempêtes solaires ajoutent de l’énergie cinétique aux particules de l’atmosphère terrestre. Par conséquent, l’atmosphère s’étend et gagne en densité. Cela accroît la traînée subie par les objets qui s’y déplacent, à l’instar des satellites, et réduit la taille de leur orbite, les rapprochant de la basse atmosphère dans laquelle ils se consument. Les GPS embarqués suggèrent que l’escalade de la vitesse et de la gravité de la tempête a entraîné une augmentation de la traînée atmosphérique jusqu’à 50 % supérieure à celle des lancements précédents, explique SpaceX dans un billet de blog.
Si les équipes de Starlink ont placé les satellites en safe mode, c’est-à-dire qu’ils ont volé sur le côté pour minimiser la traînée et se protéger de la tempête, leurs efforts n’ont pas été suffisants. Les analyses préliminaires montrent que l’augmentation de la traînée à basse altitude a empêché les satellites de quitter le mode de sécurité pour entamer des manœuvres d’élévation d’orbite, et que jusqu’à 40 des satellites rentreront ou sont déjà rentrés dans l’atmosphère terrestre, explique l’entreprise.
Les appareils seront donc consumés lors de leur entrée atmosphérique, SpaceX tient d’ailleurs à préciser que les satellites désorbités ne présentent aucun risque de collision avec d’autres satellites et, de par leur conception, ils se désintègrent lors de la rentrée dans l’atmosphère, ce qui signifie qu’aucun débris orbital n’est créé et qu’aucune partie du satellite ne touche le sol.
Le Soleil oscille entre des périodes d’hyperactivité et de quiétude. Image : NASA Goddard Space Flight Center / FlickR
Cet événement démontre les dangers qu’encourent les constellations de satellites se trouvant en orbite terrestre basse, qui vont en plus se faire bien plus nombreuses dans les années à venir avec un secteur spatial privé en plein boom. En outre, il est important de noter que le Soleil a un cycle de 11 ans au cours duquel il oscille entre des états d’hyperactivité et de calme ; il se dirige actuellement vers son pic qui devrait avoir lieu en 2025, les phénomènes tels que les tempêtes solaires devraient donc s’accroître et même se montrer bien plus violents durant cette période… Cela laisse supposer le pire pour les petits satellites évoluant en orbite basse.
La perte de 40 satellites peut paraître minime pour SpaceX, qui compte d’ores et déjà plus de 1 900 appareils en orbite et compte en envoyer des milliers d’autres avec l’objectif d’offrir un réseau Internet aux régions les plus reculées du monde. Elle représente toutefois une perte équivalent à 100 millions de dollars car, en plus des satellites, il faut également prendre en compte le prix du lancement par la fusée Falcon 9.
Selon Hugh Lewis, un expert en débris spatiaux à l’Université de Southampton en Angleterre interrogé par le New York Times, la perte de ces satellites est une dure leçon pour SpaceX. J’espère que cela va les ramener à la raison, continue-t-il. En effet, il serait préférable pour la firme de prendre en compte la météorologie de l’espace, en plus des conditions climatiques sur Terre, avant d’opérer un lancement.
Les constellations de satellites suscitent de vives critiques de la part de la communauté scientifique : en plus d’augmenter le risque de collision et de débris spatiaux en orbite, ils affectent directement l’observation du cosmos par les astronomes. D’ailleurs un Centre pour la protection du ciel étoilé contre les interférences satellitaires a récemment été créé afin de solutionner ce problème qui prend de plus en plus d’importance.
Siècle Digital
Elon Musk, génial, odieux, et parfois incompréhensible : que signifie cette offre d’un milliard $ à Wikipédia pour un simple changement de nom ? Elon Musk et Henri IV auront tous deux des enfants nés à quelques semaines d’écart, donc de femmes différentes. Pour Henri IV, on en compte 18, légitimes et illégitimes cumulés, pour Elon Musk, en 2024 le compte est à 8, mais Elon Musk, contrairement à Henri IV, n’est pas mort, car il bande encore, car il bande encore.
de face, Elon Musk, de dos Donald Trump, le 5 octobre 2024 à Butler, Pennsylvanie. Réélu en novembre 2024, Donald Trump le nommera à la tête d’une commission – la commission de la hâche – à durée de vie limitée sur l’efficacité gouvernementale, c’est à dire qu’il sera en charge du démantèlement de la bureaucratie. Ça va tanguer.
6 02 2022
Les JO de Pékin ne sont pas votre tasse de thé ? Soit. Ce n’est pas important, mais ce qui est important, c’est de ne pas se priver de quelques minutes d’exception, de ne pas se priver d’un chef d’œuvre de performance technique, de vitesse et de légèreté, marié à une grâce de chaque instant, sur la musique In Memoriam, de Kirill Richter [1] : c’est Kamila Valerievna Valieva (en russe : Камила Валерьевна Валиева) née le 26 avril 2006 à Kazan. À vous couper le souffle ! On pense au ballerina assoluta que les Italiens décernaient à Sylvie Guillem. Une explosion de talent, de virtuosité, de bonheur de patiner ! Et si un zeste de trimétazidine [2] vient se présenter aux contrôles, on prendra un malin plaisir à fermer les yeux. De toutes façons, les yeux étaient déjà fermés, car la simple participation à ces Jeux en Chine demandaient qu’on les ferme sur ces innombrables violations des droits de l’homme, au premier rang desquelles le traitement infligé aux Ouïgours, avec camps de concentration et tutti quanti.
Et, un an plus tôt :
8 02 2022 : J – 16 avant que Poutine n’envahisse l’Ukraine
Hélène Carrère d’Encausse, célèbre historienne, spécialiste de la Russie, qui a si souvent et si longtemps exercé une certaine influence sur la politique russe de la France, secrétaire perpétuelle de l’Académie Française, députée européenne de 1994 à 1999 dans les rangs du RPR/UDF, donne une interview au Point sur la situation actuelle de la Russie :
Poutine n’a pas l’intention d’envahir l’Ukraine, car la Russie y perdrait beaucoup. Poutine n’est pas un imbécile ou un ignorant des conditions de la vie internationale
Une semaine plus tard, elle enfoncera le clou, dans Marianne : Envahir l’Ukraine aujourd’hui ou à la fin des Jeux de Pékin serait pour la Russie un projet dangereux et contreproductif. D’abord parce que cela ruinerait définitivement les relations entre Russes et Ukrainiens, alors que les liens personnels et familiaux, entre les deux peuples sont réels, et que, pour la Russie, et pour Poutine, Russes et Ukrainiens sont frères.
Elle mourra 18 mois plus tard, peut-être bien de honte, pour autant que la honte soit encore un produit mortel. Au grand bêtisier des aveuglements politiques, il faut tout de même remonter à Charles Maurras le 8 mars 1936 pour en voir un de cette acabit : Nous n’avons pas à marcher contre Hitler avec les Soviets, ou encore à Chamberlain qui, du balcon du 10 Downing Street, au lendemain des accords de Münich, le 1° octobre 1938, roucoule : Mes amis, c’est la seconde fois dans notre histoire qu’est venue d’Allemagne la paix dans l’honneur. Je crois que c’est maintenant la paix pour notre époque. Maintenant, je vous conseille de rentrer chez vous et de dormir paisiblement.
11 02 2022
L’Alfred-Merlin, le navire du département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm), stationné au large de la Corse reçoit un message d’Ocean One, un nouveau robot d’archéologie sous-marine : 490 mètres. On est au fond et en approche. Fermée, la main droite, seule visible sur l’écran en surface, tient entre ses quatre doigts mécaniques le manche du grappin qui lui a été confié, un peu plus tôt. La sonde indique 496 mètres de profondeur quand, enfin, apparaît l’épave du Francesco-Crispiun paquebot coulé par les Anglais, en avril 1943, par 507 mètres de fond, au large de Bastia, avec les 900 soldats italiens alors à son bord.
Deux mètres de longueur pour un poids de deux cents kilos, une tête mobile et deux yeux caméras, deux bras à sept articulations prolongés de mains interchangeables à quatre ou cinq doigts, un corps couleur orange en forme de sarcophage équipé de huit hélices… revoilà Ocean One. Ou plus exactement, la version K de ce prototype d’humanoïde à même d’être contrôlé à distance pour des opérations d’archéologie en milieu sous-marin.
Six ans après sa première mission, par 90 mètres de fond, sur le site de La Lune, une frégate coulée en 1664, du temps de Louis XIV, en rade de Toulon, le robot mi-homme mi-poisson imaginé par l’équipe d’Oussama Khatib, avec le soutien du Drassm et du Laboratoire d’informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier (Lirmm, CNRS-université de Montpellier), a achevé le 17 février sa deuxième campagne d’essais en Méditerranée par une première mondiale : une spectaculaire descente dans une fosse sous-marine des environs de Cannes… à – 852 mètres.
Cette plongée historique, qui marque l’entrée de la robotique humanoïde dans des espaces abyssaux inaccessibles aux plongeurs humains, même équipés de caissons hyperbares – le record de résistance à la pression détenu par la Comex depuis 1992 est de 701 mètres –, avait été précédée de plusieurs autres, les 9 et 10 septembre 2021 et entre le 6 et le 16 février 2022, sur quelques-unes des plus belles épaves des eaux françaises. D’abord, aux environs de La Ciotat, sur un avion de chasse P-38 de l’US Air Force (38 mètres de profondeur) et le sous-marin français Protée (125 mètres). Ensuite, en Corse, face à Aléria et à Bastia, sur un navire romain du I° ou du II° siècle – baptisé par les chercheurs épave Aléria 1 (334 mètres) – et le Francesco-Crispi (507 mètres). Et enfin, non loin de Théoule-sur-Mer, sur un avion Beechcraft Baron F-GDPV (67 mètres).
A 67 mètres de profondeur, l’épave d’un avion Beechcraft Baron F-GDPV, près de Théoule-sur-Mer (Alpes-Maritimes), le 16 février 2022. FREDERIC OSADA / DRASSM / STANFORD
L’objectif de l’équipe d’Ocean One K n’est pas à ce stade de démontrer la supériorité de sa technologie par rapport à celles existantes, mais seulement de valider un concept, celui d’une machine aux bras téléopérés à même d’intervenir, de manière polyvalente et sans risque d’endommagement du matériel archéologique, sur des sites de fouilles hors de portée de la plongée individuelle, explique l’ancien directeur du Drassm (2006-2021) et membre de l’Académie de marine Michel L’Hour, qui porte le projet depuis 2014, dans le cadre d’un programme de robotique lancé au moment de son arrivée :
Restitution au pilote placé en surface des sensations de poids, de dureté et de rugosité des pièces mécaniques gisant sur le fond ;
Récupération d’artefacts déposés en surface de la vase à l’aide de mains artificielles ;
Accroche par un grappin d’une mire de photogrammétrie sur une rambarde ;
Insertion et maniement d’une perche équipée d’une caméra à l’intérieur d’anfractuosités ;
Piégeage d’oursins dans une boîte à échantillons…
Si toutes les épreuves n’ont pas toujours donné les résultats escomptés en raison de la luxation de l’épaule gauche et de la panne d’un propulseur dont fut victime Ocean One au pire moment, du moins le potentiel est-il là.
Et ce serait l’essentiel. Ce programme exploratoire a toujours eu le but de préparer le terrain pour les générations futures, afin de leur éviter d’être un jour dépassées par la technologie comme ce fut le cas dans les années 1950, quand l’archéologie sous-marine naissante a complètement raté le tournant de la plongée individuelle, explique Michel L’Hour. Des siècles et des siècles de tempêtes, d’incidents, de guerres et d’actes de piraterie ont fait des mers et des océans d’immenses cimetières où gisent d’innombrables vaisseaux.
Or, la préservation de ce patrimoine sous-marin des grandes profondeurs ne serait plus, depuis plusieurs années déjà, garantie par son inaccessibilité. La pêche au chalut, qui laboure les fonds jusqu’à 1 800 mètres, menace de destruction les épaves des grandes profondeurs. Et cela avant même que les archéologues aient eu le temps de les recenser et de les étudier, assure Michel L’Hour. Que faire ? Une fouille sous-marine nécessitant l’envoi de plongeurs et ces derniers ne pouvant travailler au-delà des 60 premiers mètres de la colonne d’eau [5], une solution est de parier sur les progrès de la robotique.
Tout le défi consiste à mettre au point des équipements légers, utilisables par des néophytes et à même de reproduire, dans les abysses, les gestes et les ressentis propres au travail d’archéologue, poursuit l’ancien patron du Drassm : C’est-à-dire, réussir à créer des machines non pas seulement conçues pour exécuter sans discernement des ordres comme ces robots à bras hydrauliques dont dispose l’industrie pétrolière, mais aussi capables d’adapter leurs efforts à la tâche de manipulation à accomplir afin d’éviter, par exemple, qu’elles endommagent les objets en les arrachant trop brusquement de la vase. En somme, conclut le marin, il faudrait inventer des avatars d’archéologues-plongeurs …
C’est cette voie de recherche que prétend incarner Ocean One, autour duquel s’affairent, depuis 9 heures ce 9 février, deux étudiants de Stanford, Wesley Yuan Guo et Hadrien Piedra, et un groupe de roboticiens venus de Toscane. Membres de l’Institut italien de technologie et de l’université de Pise, ces derniers sont occupés à calibrer une main artificielle qu’ils ont fixée à l’extrémité du bras du robot. Carafes, tasses… divers ustensiles de cuisine, chipés au carré, sont présentés au prototype, dont certains, échappant à ses cinq doigts et à ses deux arcs palmaires réunis par vingt et une articulations, sautent, rebondissent et finissent par-dessus bord, au désespoir de Nicolas Stern, le cuistot.
Censé pouvoir, une fois actionné, s’adapter automatiquement à la forme des objets pour les saisir, cet étonnant dispositif rappelant La Chose, l’inquiétante créature de La Famille Addams, doit aider Ocean One à récupérer des artefacts sur les restes de l’épave Aleria 1 lors de la prochaine plongée. Cette dernière s’annonce spectaculaire. La responsable d’opération, Franca Cibecchini, du Drassm, n’a-t-elle pas indiqué, lors d’un briefing, que la cargaison de céramique et de verrerie de cette épave, découverte en 2012 par 334 mètres de fond aux environs d’Aléria, est dans un état de conservation exceptionnel ? Si Ocean One parvenait à remonter ne serait-ce que la petite lampe à huile à deux becs et à réflecteur en triangle qui a été repérée sur les diagrammes photogrammétriques, il participerait à une jolie découverte, avait alors rêvé tout haut cette spécialiste du commerce antique méditerranéen… On n’en est pas encore là. Pour l’heure, l’équipage s’active pour mettre à l’eau les divers instruments.
Le Drassm a consacré ses moyens techniques les plus récents à cette campagne hors normes, maintes fois retardée, et qui a finalement dû être tronçonnée en deux. Outre son petit robot sous-marin (ROV) Hilarion, qui a été poussé jusqu’à ses ultimes limites en matière de résistance aux pressions des profondeurs, l’institution dépendant du ministère de la culture et de la communication a mobilisé l’Alfred-Merlin. Ce bâtiment entré en service en juillet 2021 est le seul de sa flotte de catégorie 1, c’est-à-dire à même de traverser l’océan pour rallier l’outre-mer. Le tout nouveau ROV ultraléger Arthur, conçu par Vincent Creuze, enseignant-chercheur au Lirmm, dont il est équipé travaille jusqu’à 2 500 mètres, et a participé à l’ultime plongée par 852 mètres de fonds d’Ocean One. Le garage de ce dernier (une sorte d’ascenseur relié à la surface par des câbles électriques et des fibres optiques, dans lequel il descend et remonte grâce à un treuil placé sur le pont du navire) peut servir de relais pour l’alimentation en énergie et les communications d’autres robots. Trente-cinq mètres d’ombilicaux reliaient Ocean One à ce système durant les opérations.
À ces niveaux de profondeur, l’obscurité est totale. Et au début, seul le sillon du chalut qui a traversé l’épave et dispersé sa cargaison est visible sous le faisceau des phares. Quand soudain, comme sortie tout droit d’un rêve d’Atlantide et de cités perdues, la nef antique apparaît. Des dizaines, peut-être des centaines de lampes à huile, de céramiques fines, de pelves (sortes de mortiers) et d’amphores sont répandus sur le fond, formant des amoncellements couverts de poissons multicolores et de langoustines.
Ocean One a entamé sa descente, suivi de près par le garage. Entièrement remanié pour lui permettre de résister aux pressions jusqu’à 1 000 mètres de profondeur, l’humanoïde est le dernier avatar du champ de la compliant robotics (ou robotique élastique). Il peut, sur la base des informations envoyées par des capteurs de force placés au niveau de ses articulations, planifier ses mouvements en recourant à des stratégies extraites de l’observation de l’organisme humain en action, explique, tout en se préparant, Oussama Khatib, natif de Syrie, qui fut aussi élève à l’école Supaéro de Toulouse. Résultat : la machine adapte automatiquement ses efforts et ses dépenses d’énergie à la tâche à accomplir, ce qui lui confère à la fois souplesse et dextérité. L’engin sait aussi coordonner les déplacements de ses bras et de son corps pour naviguer avec efficacité, et peut restituer à distance à son opérateur certaines sensations tactiles, comme celles créées dans les mains et le long des membres supérieurs par la manipulation d’un objet.
Le tournoiement des crevettes roses crée des traînées lumineuses qui parasitent l’image 3D occupée en son centre par la main aux cinq doigts écartés d’Ocean One. Initialement, le plan prévoyait que le robot rallie une zone dégagée plus apte aux récupérations. Mais l’engin, dont l’un des huit propulseurs s’est brusquement arrêté, peine à compenser les mouvements qui le déportent systématiquement vers la droite. Renonçant à aller plus loin, Oussama Khatib décide de jouer son va-tout : il ordonne au robot de s’emparer d’une des pièces proches. En vain. Trop vite déportée par la poussée des moteurs déréglés, la main n’atteint pas la cible à temps : elle fouille au mauvais endroit et soulève des nuages de vase qui obscurcissent la vue des caméras. Une fois, deux fois… chaque tentative se solde par un échec. Enfin, au terme d’un bon quart d’heure de grattage de surface plus ou moins hasardeux, Ocean One parvient à empoigner une poterie.
Victoire ? Pas si vite ! Il faut encore déposer l’objet dans le panier d’Hilarion. Guidé par les images du garage, qui observe la scène en surplomb, le ROV s’approche de l’humanoïde déséquilibré, au risque d’y emmêler ses ombilicaux, et se positionne sous le bras qui… lâche l’artefact ! De quoi s’agissait-il ? On ne le saura jamais. Stéphane Denis, le plongeur du Drassm, n’a rien trouvé dans la boîte à échantillons remontée. Jalouse et souveraine, la mer n’a pas voulu, ce jour-là, livrer aux hommes d’avenir les secrets des civilisations du passé…
Vahé Ter Minassian. Le Monde du mars 2022
Jusqu’à – 100, on ne peut pas dire qu’Ocean One soit très convaincant : performances très limitées et aléatoires : l’homme reste sans conteste nettement plus performant. Pourquoi dès lors ce choix de s’en passer ? Pas pour les performances techniques, mais très probablement pour des considérations purement financières : l’intervention de plongeurs coûte beaucoup plus cher : décompressions, durées beaucoup plus longues etc…
22 02 2022
À Dubaï, on inaugure le Musée du futur, du cabinet Lilla Design. Les économies d’énergie ne sont pas au programme. En service la langue de bois du futur, pour laquelle, très confortablement, rêve et réalité peuvent être mixées tout à loisir. Et l’on ne s’en prive pas.
Les géomètres diront que c’est un tore, les bijoutiers un anneau en équilibre sur la tranche, les pâtissiers un beignet, les cyclistes une chambre à air et les architectes tout simplement une prouesse. Conçu par le cabinet Killa Design, à Dubaï, ce bâtiment à structure métallique, sans squelette de béton, interloque tant par sa forme que par sa surface uniformément convexe, ciselée de trois immenses citations de l’émir sur le futur, en calligraphie arabe. Chaque caractère est une fenêtre dans cette façade toroïdale, elle-même composée de un millier de pièces uniques en acier inoxydable fabriquées par des robots. 77 mètres de haut.
22 02 2022
À la suite de la reconnaissance par la Russie de l’indépendance de deux républiques autoproclamées en Ukraine, le chancelier allemand Olaf Scholz suspend le processus de certification du projet de gazoduc Nord Stream II. Le I°, Nord Stream 2 SA déposera son bilan, à la suite des sanctions décidées par l’Allemagne, l’Union européenne et les États-Unis en réaction à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Le , Gazprom annonce, après plusieurs réductions et interruptions du transit pendant l’été, le report sine die du redémarrage du gazoduc Nord Stream 1.
Wikipedia
24 02 2022 5 h 05′
Depuis vingt ans, à part Gerhard Schröder, ancien chancelier d’Allemagne, président de Nord Stream et de Rosneft, deux sociétés russes, et son grand copain Jean-Claude Killy] [3] on savait Vladimir Poutine cynique, mais le voilà devenu paranoïaque : il envahit l’Ukraine pour la réintégrer dans le giron russe [4]. 76 ans après la fin de la seconde guerre mondiale, la guerre sévit à nouveau en Europe, avec son cortège d’horreurs : des civils bombardés, leurs corps balancés dans des trous en charniers de centaines de personnes, les silos de blé pillés pour repartir en train, en camion en Russie etc etc… Dans le même temps, ils détruisent les communications ukrainiennes par satellite en détruisant au sol le système Viasat.
Et toutes nos classes de jouer les vertus outragées, mais quand le même Poutine avait envahi la Crimée, quelques années plus tôt, qui avait dit, fait quelque chose ? Au mieux, François Hollande avait refusé de livrer les frégates promises à la Russie. Sinon, rien ! L’espionnage français se sera montré complètement à côté de la plaque, enferré dans le mythe de la nécessaire alliance avec l’invincible Russie qui n’allait faire qu’une bouchée de l’Ukraine !
Au 21 février 2022, l’exportation de gaz et de pétrole rapporte 600 millions $/jour à la Russie. Un seul missile Patriot made in USA coute 3 millions $, le M 142 HIMARS, – High Mobility Artillery Rocket System – lance roquette multiples de missiles balistiques tactiques : 3.8 millions $ l’unité, en 2020 ! Le système NASAMS, Norwegian Advanced Surface to Air Missile System, batterie de missiles sol-air norvégienne destinée à la lutte antiaérienne à moyenne et longue portée : 1.216 milliard $ les 8 ensembles ! Quelques mois plus tard, l’Ukraine tirera quelques 60 000 obus par jour…. ( un millions d’obus de février 2022 à mars 2023) 60 000 obus, c’est la production annuelle de la France ! l’appui de la France à l’Ukraine se chiffre à 5 millions €/jour ! 1.8 milliard/an ! 3.2 milliard € du début de la guerre au 10 novembre 2023. Pour les États-Unis, depuis le début de la guerre à novembre 2024, l’aide se monte à 75 milliards $, dont 50 pour l’armement. Si, une fois installé à la Maison Blanche en janvier 2025, Trump décide de fermer le robinet de l’aide à l’Ukraine, cela entraînera rapidement la défaite de l’Ukraine, car, hors l’aspect financier, les États-Unis ont mis à la disposition du pays des instruments de guidage vers les cibles qu’ils sont les seuls à fabriquer. Pour l’Allemagne, l’aide se monte à 17 milliards € . La Russie lancera ses missiles Kinjal Kh-47, avec une vitesse de croisière de Mach 5, Mach 10 arrivée près de l’objectif : aucune défense antiaérienne n’est à même d’intercepter pareille fusée. Jusqu’à l’été 2023, les alliés de l’Ukraine parlaient de cession, pour définir le cadre économique au sein duquel se déroulait ces fournitures d’armement, c’est à dire que ces fournitures étaient des dons ; à partir de l’automne 2023, on parlera de contrat, c’est à dire que des fournitures d’armes deviendront payantes, fut-ce à crédit : et cela va changer beaucoup de choses. Et puis, il y a aussi l’incroyable difficulté à mettre de l’ordre chez soi : début 2024, la plus grande difficulté de l’Ukraine sera de recruter des soldats pour relever ceux qui sont sur le front, épuisés, depuis deux ans, et l’on apprend que l’âge à partir duquel les hommes sont appelés aux armées est de 27 ans ! Quelles sont donc les forces obscures qui s’opposent à une conscription dès 18 ans ? Combien d’hommes entre 18 et 27 ans sont ainsi tenus à l’écart du front ! Le pouvoir va mettre huit mois pour abaisser à 25 ans l’âge de la conscription jusqu’alors de 27 ans ! La mobilisation à partir de l’âge de 20 ans permettrait d’envoyer un million d’hommes supplémentaire sur le front. Répondez, s’il vous plait, Monsieur Volodimir Zelenski ? Il y va de votre crédibilité, car il y a de la tromperie dans cette affaire. Et il y a encore le phénomène des désertions qui va croître de façon exponentielle : de janvier à septembre 2024, elles seront de 51 000 ! Les soldats en auront marre de ne jamais être relevés, de rester constamment sur le front dans le danger quand on est tranquille à l’arrière.
Et puis, les régimes démocratiques ne fonctionnent pas tous avec les mêmes règles : en février 2024, le Congrès américain à majorité républicaine bloquera tout supplément d’aide à l’Ukraine qui se retrouvera donc à ce moment-là, sans aucune livraison d’armes en provenance des États-Unis, jusqu’à ce qu’en avril 2024, le congrès parvienne à faire voter une aise de 61 milliards $, quand, à peu près dans le même temps, l’Europe, non sans mal – il s’agissait d’obtenir l’approbation de Victor Orbān, le président hongrois – parviendra à voter une aide à l’Ukraine de 50 milliards €.
Économiquement, ce conflit va avoir des conséquences catastrophiques pour la France. Le robinet du gaz russe, qui arrive en Occident par Nordstream I et II, va se fermer pour l’Allemagne qui, ayant choisi de se passer du nucléaire, va impérativement avoir besoin de gaz, et donc, va l’acheter à n’importe quel prix, partout dans le monde, sauf en Russie. Le gaz est devenu un produit parfaitement spéculatif. Or, depuis la loi NOME, le prix de l’électricité en France est couplé à celui du gaz, et donc, une augmentation du prix du gaz entraine de facto celle de l’électricité qui va être multiplié à compter du 1° janvier 2023, par 4, et parfois jusqu’à 6… de quoi envoyer au tapis entre 150 000 et 300 000 entreprises ! Et les entreprises qui n’auront pas fait faillite, iront voir ailleurs : le prix de l’énergie est quatre fois moins élevé aux États-Unis qu’en Europe.
La puissance de l’industrie allemande est trois fois plus importante que celle de la France, qui a laissé son pays se désindustrialiser ces vingt dernières années, remplaçant le raisonnement par l’incantation en affirmant qu’on allait consommer de moins en moins d’énergie, et donc que l’on pouvait se permettre de fermer la centrale de Fessenheim et quelques autre sources d’énergie fossile, réduisant la consommation de 13 Gw sur les dix dernières années. Ce choix était à l’opposé de toute analyse un tant soit peu rigoureuse, lesquelles assurent que plus ça va, plus on consommera d’électricité. On s’est laissé envahir par les panneaux solaires chinois, subventionnée à outrance, ce qui a laminé en quatre ans nos fabricants de ce produit. L’industrie française représente 20 % de la consommation énergétique. N’allons pas croire qu’un pays sans ressources minières et énergétiques ne peut pas se développer : la Corée du Sud en est le contrexemple, qui, en 1950 était un des pays les plus pauvres du monde, même s’il y a beaucoup à dire sur les méfaits de l’ultralibéralisme qui y sévit. Cette désindustrialisation n’est pas inéluctable : il y a une très forte épargne en France : 5 500 milliards € qu’il suffirait d’orienter, avec l’inévitable prise de risque que cela représente, vers l’industrie.
Maroussia est une variante du prénom Marie.
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En mars 1999, un avion fait demi-tour au-dessus de l’Atlantique, au lieu d’atterrir comme prévu à Washington. À son bord se trouve un homme exaspéré : le premier ministre russe, Evgueni Primakov. Par téléphone satellite, il vient d’apprendre de la bouche du vice-président américain, Al Gore, que les États-Unis déclenchaient une campagne de frappes aériennes, sous étendard de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), en Serbie et au Kosovo. L’objectif – éviter des massacres contre la population albanaise de la province – importe plus que l’absence de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU. La Russie de cette époque est très affaiblie, à l’image de la santé de son président, Boris Eltsine. L’été précédent, elle a connu un effondrement financier. Sa dette extérieure est vertigineuse. Elle ne pèse pas. Cet avion qui se détourne des côtes américaines est un coup d’éclat symbolique.
Evgueni Primakov voit plus loin. Depuis plusieurs années, il a défini une doctrine qui portera son nom en politique étrangère : elle vise à empêcher un monde unipolaire et une extension de l’OTAN, en privilégiant, notamment, un rapprochement avec la Chine. Il s’agit de relever la Russie. Académicien, orientaliste, Primakov est né à Kiev. Ancien patron des services de renseignement extérieurs, il ne conduira pas ce programme à bien. En août, après l’intermède Sergueï Stepachine, c’est le patron du FSB, les services intérieurs, qui lui succède. Vladimir Poutine est un homme maigre au teint de craie, inconnu du grand public. Un quatrième premier ministre en dix-sept mois, que personne n’imagine durable.
Pourtant, les événements s’accélèrent. Attentats contre des immeubles civils en Russie, début de la seconde guerre de Tchétchénie… Boris Eltsine démissionne pour le Nouvel An et cède la place à Poutine. Les débuts sont plutôt constructifs. Les relations avec l’OTAN sont rétablies. En juin 2001, le président George W. Bush rencontre son homologue russe en Slovénie. Il le regarde dans le fond des yeux, et il dit y voir son âme. Une chance rare.
Vingt et un ans plus tard, fin février 2022, Vladimir Poutine rappelle à l’Europe ce qu’est une guerre en son sein. L’armée russe suréquipée est le bras d’une mission : il s’agit de détruire l’Ukraine comme réalité et projet, de pulvériser ses rêves d’émancipation et de renvoyer l’Amérique à ses vertiges. Face à l’énormité de l’offensive, les explications s’entrechoquent, témoignant avant tout de notre incapacité collective à trouver un sens à cette entreprise dévastatrice. Pourtant, l’histoire de ces vingt dernières années, dans les relations bilatérales entre les États-Unis et la Russie, est riche d’enseignements. Elle n’est pas un arrière-plan, mais le socle même sur lequel l’Ukraine est suppliciée. Elle raconte comment les incompréhensions ont nourri une amertume, puis une hostilité. Comment Vladimir Poutine, confronté à cinq présidents américains, a conduit son pays à devenir un paria du monde.
Le pouvoir russe s’est forgé plusieurs convictions, au fil de ces deux décennies. La première concerne l’hypocrisie de l’Occident, qui violerait les principes de droit qu’elle veut imposer à Moscou. La guerre au Kosovo et la mort de Kadhafi en Libye – qui aurait profondément marqué Poutine – en sont deux bornes. D’où un sentiment de trahison et un syndrome de la citadelle assiégée, alimentés par l’extension de l’OTAN et les révolutions de couleur dans la périphérie russe, attribuées au bras long américain. Comme si les peuples ne disposaient pas de leur propre autonomie et ne pouvaient être que le jouet de puissances extérieures. La seconde conviction est l’affaissement historique de la puissance américaine, épuisée par ses divisions internes et par ses aventures militaires au Moyen-Orient. La troisième conviction, enfin, est déduite des précédentes. Dans ce nouveau monde éclaté du XXI° siècle, l’audace proactive, la force brute, le fait accompli territorial offrent un avantage décisif, bien supérieur aux sanctions en retour, au coût de ces opérations ou à l’opprobre suscité. L’usage de la violence n’est plus seulement un moyen, mais un but en soi, l’expression d’une capacité de projection, d’une ambition.
Sur le plan intérieur, la violence sert à réprimer toute contestation et à dissuader toute coagulation des mécontentements. Il en va ainsi en Russie depuis vingt ans : la stabilité est la base du contrat social, et le chantage une garantie. Les élites gavées par la corruption et les relations privilégiées sont sommées d’être loyales, sous peine de déchéance. Sur le plan extérieur, la violence permet d’avancer sur la mappemonde, d’affaiblir l’adversaire. Ce système se nourrit de rivalités, et peu importe qu’elles soient réelles ou imaginaires. Le bien et le mal, la vérité et le mensonge, sont devenus, au fil des ans, des catégories jugées surannées, oripeaux des vulnérables, de ces démocraties libérales abhorrées. Une erreur d’appréciation énorme, au vu de la mobilisation de l’Occident depuis le début de l’offensive russe en Ukraine. Cette erreur traduit moins l’existence d’un grand dessein à Moscou, d’un fantasme géopolitique comme la reconstitution d’un empire russe ou néosoviétique, que d’un appétit croissant, insatiable, à la fois opportuniste et dogmatique, de revanche.
Eté 2001. Vladimir Poutine est président depuis six mois. On apprend à le connaître. Lors d’une conférence de presse remarquée, il affirme que la Russie ne voit pas l’OTAN comme une organisation hostile. Poutine envisage même l’hypothèse d’une adhésion de son pays à l’Alliance, ou une participation active aux délibérations. Il ajoute cependant, dans l’éventualité où l’OTAN tournerait le dos à Moscou : Nous continuerons à nous défier les uns des autres, même si je pense que chacun comprend à présent que la Russie ne menace personne.
Deux semaines ont passé depuis les attentats islamistes contre le World Trade Center et le Pentagone, aux États-Unis. Le président russe a été le premier dirigeant étranger à appeler George W. Bush pour manifester sa solidarité. La Russie dessine un front commun, de la Tchétchénie à Al-Qaïda, contre les djihadistes. Elle joue un rôle-clé dans la constitution d’une coalition internationale. Devant les députés allemands, Poutine se prétend de son époque : Nous ne nous sommes pas libérés de stéréotypes et de clichés issus de la guerre froide. Mais la guerre froide est terminée, devant le Bundestag, en septembre 2001
À l’intérieur, la Russie durcit ses traits. La seconde guerre en Tchétchénie, commencée à l’automne 1999, est une litanie de massacres et de crimes de guerre. Grozny est rasée. Une prise d’otages à Moscou dans le Théâtre Doubrovka perpétrée par un commando islamiste tchétchène, en octobre 2002, s’achève avec l’emploi d’un gaz mortel par les forces russes. Quelque cent trente otages périssent avec les terroristes. Enfin, en octobre 2003, Mikhaïl Khodorkovski est arrêté. Le patron du groupe pétrolier Ioukos passera dix ans en prison, pour n’avoir pas compris les nouvelles règles du jeu entre le pouvoir et les oligarques, imposées par Poutine. Quelques semaines plus tard, c’est la révolution des roses en Géorgie. Mikheïl Saakachvili, jeune réformateur atlantiste, devient président. L’idée d’une entreprise d’encerclement et de déstabilisation occidentale s’installe au Kremlin.
La défiance contre les États-Unis est renforcée par la guerre d’Irak, engagée en mars 2003. George W. Bush et les néoconservateurs ont bâti cette aventure militaire, si coûteuse en vies et en fonds, si catastrophique pour les équilibres régionaux, sur la base de mensonges d’État. L’invention d’armes de destruction massive supposément aux mains de Saddam Hussein ne porte pas seulement atteinte à la crédibilité américaine, elle offre au Kremlin la certitude que les forts définissent leur vérité, au lieu de la respecter. Mais Poutine ne tire pas encore toutes les conséquences de cette révélation. L’heure est à la consolidation intérieure. Le pétrole et le gaz vont la faciliter.
En mars 2004, sept nouveaux pays intègrent l’OTAN (Bulgarie, Estonie, Lettonie, Lituanie, Roumanie, Slovaquie, Slovénie), confirmant l’extension de l’Alliance atlantique vers l’est, cinq ans après l’adhésion de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque. La vocation historique de l’organisation, assurant une sécurité collective à ses membres, se double d’une sorte de visée politique, faite de démocratisation et d’ouverture. Le Kremlin est persuadé de l’existence d’une stratégie de conquête sournoise dans sa zone d’influence. Or, dans la psyché de l’élite au pouvoir, domine encore l’idée d’un rouski mir – un monde russe – dont Moscou serait le centre de gravité. Dans cette vue sans frontières, les États issus de la décomposition de l’URSS sont jugés artificiels. Des cabanes en bois.
Les événements en Ukraine attisent cette inquiétude. En novembre 2004, la révolution orange précipite dans la rue une foule nombreuse, protestant contre l’élection truquée de Viktor Ianoukovitch. C’est Viktor Iouchtchenko, empoisonné quelques mois plus tôt et perçu comme hostile à l’influence russe, qui prend la tête de l’État. Il n’existe pas alors en Ukraine de projet nettement articulé et populaire d’ancrage à l’ouest.
À Washington, on considère encore Vladimir Poutine comme un partenaire, certes difficile mais utile dans certains dossiers. En l’accueillant à la Maison Blanche en novembre 2005, George W. Bush déclare : Je vous apprécie beaucoup, ainsi que votre compréhension de cette guerre contre le terrorisme. Nous comprenons aussi que nous devons œuvrer à arrêter la prolifération des armes de destruction massive. Les priorités sont claires. La Russie n’en fait pas partie, mais peut contribuer.
En octobre 2006, l’assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa à Moscou, puis l’empoisonnement mortel au polonium, fin novembre à Londres, de l’ancien agent russe Alexandre Litvinenko envoient un message en retour : celui d’une impunité de la violence qui s’installe en Russie, dans l’appareil répressif. Vladimir Poutine affirme que la mort de Litvinenko est utilisée comme une provocation politique par les Européens. La rhétorique s’aiguise. Déni, complot, repli. La volonté américaine de déployer des éléments de défense antiaérienne en Europe orientale – non dirigés contre la Russie, officiellement – est perçue par le Kremlin comme un nouveau signe de duplicité. D’autant que ses propositions d’arrangements stratégiques bilatéraux avec les Américains sont rejetées.
Fin 2007, la Russie suspend sa participation au traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FCE). Elle considère les paramètres du texte comme étant dépassés, trop restrictifs, hérités de la guerre froide. Lors d’une intervention à la conférence de Munich sur la sécurité, en février, Vladimir Poutine avait tenu le discours le plus critique envers Washington jamais prononcé depuis l’écroulement de l’URSS. Il dénonçait l’existence d’un monde d’un seul maître, et son hyper-usage de la force dans les relations internationales.
Les trois premiers mois de l’année 2008 vont constituer un virage fondamental dans les relations entre les deux puissances. Le premier événement est la proclamation d’indépendance du Kosovo, rejetée par Moscou. Il faut relire attentivement les propos tenus alors par Vladimir Poutine. Celui-ci dénonce un terrible précédent qui va faire exploser de facto le système des relations internationales, non pas pour des décennies mais des siècles. Le président russe ajoute : En fin de compte, c’est un bâton à deux bouts, et le deuxième reviendra pour les frapper au visage. Message aux dirigeants occidentaux. Ces derniers mettent ça sur le compte de l’hostilité traditionnelle de la Russie à la guerre au Kosovo. Ils ont tort. Et commettent une autre erreur.
Vladimir Poutine est invité à Bucarest, début avril, pour participer au conseil OTAN-Russie, après le sommet de l’Alliance. À cette occasion, le communiqué final formule une promesse : la Géorgie et l’Ukraine sont vouées, un jour, à rejoindre l’OTAN. C’est un compromis vague aux yeux des membres, une façon de reporter la question à plus tard, sans calendrier. Pour Moscou, c’est une ligne rouge. Ne prétendant pas à un droit de veto, Vladimir Poutine estime néanmoins que la Russie défend légitimement ses intérêts en Ukraine, en raison de la vaste population russophone. Rouski mir… Il parle d’un État très compliqué. Quelques semaines plus tard, il cède sa place au Kremlin à Dmitri Medvedev et devient son premier ministre. L’espoir d’une ouverture en Russie s’esquisse. Il fera long feu.
Début août, l’armée russe intervient en soutien des deux régions séparatistes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, contre la Géorgie. Déjà, les autorités russes prétendent qu’un génocide est commis contre les populations de ces régions et instrumentalisent un principe validé au Conseil de sécurité, celui de la responsabilité de protéger. La guerre ne dure que quatre jours. À son issue, après l’intervention en urgence de Nicolas Sarkozy, alors président en exercice de l’Union européenne, comme médiateur, la Géorgie a perdu 20 % de son territoire. Malgré le mauvais état de l’armée russe et la taille très modeste de l’adversaire, cette guerre remportée change la donne sur un plan psychologique et politique. La Russie n’est pas condamnée à subir, à être sur la défensive. La transgression devient un nectar.
L’élection de Barack Obama, aux États-Unis, fait croire à la possibilité d’un rapprochement. Washington émet l’idée d’un reset, une relance des relations bilatérales. Moscou propose de discuter de sécurité dans l’espace européen. En mars 2009, la secrétaire d’Etat Hillary Clinton offre à son homologue Sergueï Lavrov un petit cadeau : un bouton rouge portant l’inscription reset en anglais et peregrouzka en russe. Formidable lapsus du traducteur. Le mot veut dire surcharge. Malgré cet impair protocolaire, la volonté de travailler ensemble se concrétisera par la signature du traité New Start sur la réduction des armes stratégiques, en avril 2010.
Mais les printemps arabes vont à nouveau faire passer un frisson à Moscou, cette année-là. Des peuples se révoltent contre des potentats, en faveur d’élections libres et de droits civiques pleins. En Syrie, la répression s’abat sur les manifestants pacifiques. En Libye, la population de Benghazi est menacée par l’armée de Kadhafi. En mars 2011, à la surprise générale, la Russie s’abstient au Conseil de sécurité de l’ONU lors d’un vote sur une résolution autorisant toutes les mesures nécessaires pour aider la population civile libyenne. L’OTAN va prendre les rênes d’une opération militaire.
Pour Moscou, il s’agit d’un dépassement inacceptable de la résolution 1973. Poutine, pourtant simple premier ministre, se démarque de Medvedev et semble le critiquer en creux pour sa faible vigilance. Tout cela me fait penser à l’appel aux croisades à l’époque du Moyen Age, dit-il, visant les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France. La mort de Kadhafi sera pour lui le symbole absolu de l’impunité occidentale, dont il dénoncera le rôle direct, en raison de l’usage de drones contre le convoi du chef libyen. Cette intervention militaire de l’OTAN en Libye fera l’objet, comme la guerre américaine en Irak, d’innombrables rappels par le dirigeant russe, au cours des années suivantes, pour dévitaliser toutes les critiques à son endroit.
En décembre 2011, de grandes manifestations ont lieu dans les villes russes contre les fraudes constatées lors des élections législatives. Le spectre des révolutions de couleur laisse ses empreintes dans la neige moscovite. Le pouvoir se crispe, la paranoïa s’accentue. Vladimir Poutine accuseHillary Clinton d’avoir donné le signal aux manifestants, en parlant de fraudes. En mars, il redevient président du pays. Avant son entrée en fonction, deux mois plus tard, la contestation s’intensifie dans les grandes villes, surtout dans la capitale. La main de l’État s’abat comme jamais. Le régime vire vers la répression assumée. Le lien entre la politique étrangère, pleine d’amertume et d’esprit de revanche, et la ligne intérieure autoritaire saute aux yeux. Pourtant, les Occidentaux auront longtemps le tort de les distinguer. De même que le Kremlin rejette toute critique sur les arrestations d’opposants, il dédouane et couvre Bachar Al-Assad en Syrie. La Russie n’accepte plus de normes communes. Pas question de permettre une répétition du sort réservé à Kadhafi.
Le 20 août 2012, devant la presse, Barack Obama qualifie l’usage d’armes chimiques par le régime Assad contre sa propre population de ligne rouge, une expression que la Maison Blanche assumera par la suite. Un an plus tard, l’usage de gaz sarin est confirmé par les services américains dans un massacre à grande échelle, près de Damas. Pourtant, à la stupéfaction générale, Barack Obama refuse de lancer une opération militaire en représailles. Il accepte l’offre russe de s’occuper du retrait des stocks d’armes chimiques du régime. Ce renoncement à une opération extérieure jugée trop risquée a fait l’effet d’une reddition américaine, d’un abandon de poste par le gendarme du monde. Moscou y a vu un aveu de faiblesse et une ouverture à saisir. Comme si les plateaux de la balance se rééquilibraient, enfin.
Lors de la conférence annuelle du Club Valdaï – un forum sur la place de la Russie dans le monde –, deux semaines plus tard, Vladimir Poutine évoque ses propres lignes rouges que sont la souveraineté de la Russie, l’indépendance et l’intégrité territoriale. Il affirme aussi que l’Union économique eurasienne, censée séduire les pays voisins, est une priorité absolue. La sphère d’influence russe doit être consolidée. Or, l’Ukraine, conduite par le président Viktor Ianoukovitch, compte signer un accord d’association avec l’Union européenne, fin novembre 2013. Moscou exerce une énorme pression sur le dirigeant, en recourant au chantage au gaz, une pratique récurrente pendant ces années. Ianoukovitch fait volte-face. Fureur de la partie pro-européenne de la société, qui sort une nouvelle fois dans la rue.
La révolution de Maïdan, la place centrale de Kiev, commence. Elle va se conclure en février 2014 par un bain de sang et la fuite du président. Parmi les diplomates qui visitent la place se trouve, notamment, Victoria Nuland, la secrétaire d’État adjointe américaine. Les photographes la saisissent lorsqu’elle distribue du pain aux manifestants. Une sorte de métaphore, pour Moscou, du complot américain, de sa volonté de détacher l’Ukraine de la Russie, de la convertir. Le mot n’est pas usurpé, tant la dimension culturelle et religieuse importe.
La débâcle de Ianoukovitch, pour Poutine, est une réplique, certes moins sanglante mais à sa fenêtre, de la mort de Kadhafi. Un coup illégitime, fomenté de l’extérieur. Les manifestants sont dépeints en nazis. Pas question de subir. Prenant de court l’OTAN et les États-Unis, la Russie s’empare facilement de la Crimée, péninsule cédée à l’Ukraine sous Khrouchtchev, peuplée majoritairement de Russes. Les Jeux olympiques de Sotchi ont pris fin. Près de 15 000 hommes sont déployés sans le revendiquer, et sans affrontements réels avec l’armée ukrainienne. Moscou vient de piétiner le droit international et ses propres engagements vis-à-vis de l’Ukraine, au regard du mémorandum de Budapest (1994) : Kiev avait alors abandonné son arsenal nucléaire en échange de garanties sur sa sécurité. Dans la foulée, un référendum est organisé, la Crimée annexée. Vladimir Poutine se réjouit de son retour au port natal. Une sorte d’euphorie, d’ivresse nationaliste, relayée par les médias d’État, s’empare de la majorité des Russes. Une affaire de fierté retrouvée.
Le président russe, lui, se montre très émotionnel dans ses remarques, au-delà de la simple rhétorique de justification. Il exprime tout son ressentiment contre l’Occident et l’Amérique. Ils nous ont trompés encore et encore, ils ont pris des décisions dans notre dos, dit-il. Poutine cite notamment l’expansion de l’OTAN vers l’est, qu’il juge contraire aux promesses orales faites à Mikhaïl Gorbatchev, et le déploiement d’infrastructures militaires aux frontières de son pays. Il rappelle, évidemment, le Kosovo et l’épisode libyen, et remonte l’histoire, siècle après siècle, appelant Kiev la mère de toutes les villes russes. Celui qui dénonçait les croisades de l’Occident semble s’en inspirer, par effet miroir.
Après la stupeur initiale, Américains et Européens réagissent. Mais ils ont subi toute la séquence et le rouleau compresseur de la désinformation russe, et laissent s’installer dans le Donbass ukrainien un mouvement séparatiste instrumentalisé par Moscou. Les sanctions économiques décidées ne sont pas massives et paraissent trop échelonnées. Elles s’intensifient en juillet, lorsqu’un Boeing de la Malaysia Airlines est abattu par un missile tiré par les séparatistes. Joe Biden, alors vice-président, en conservera un souvenir cuisant. Ces derniers mois, toute la stratégie de son administration face à la menace russe s’est bâtie en opposition avec les choix faits sous Obama : anticipation, dénonciation publique, sanctions à portée de main.
Le 5 septembre 2014 sont signés les accords de Minsk, visant à normaliser la situation dans le Donbass. La Russie a réussi à s’imposer avec duplicité : fausse médiatrice, elle déploie les séparatistes comme un marionnettiste. L’Allemagne et la France vont s’employer à la tirer par la manche, pour la convaincre de baisser l’intensité du conflit. Il fera 14 000 morts au total. La Russie ne lâchera rien. Le Donbass est un instrument de déstabilisation à long terme de l’Ukraine, conçu pour la priver de tout espoir de normalisation. Paris et Berlin fermeront les yeux sur cette évidence, faute d’autre solution. Ils n’obtiendront pas grand-chose en échange.
Fin février 2015, l’ancien vice-premier ministre Boris Nemtsov, qui préparait un rapport sur l’implication russe dans le Donbass, est abattu à deux pas de la muraille du Kremlin. En mars, la Russie suspend ses activités dans le cadre du traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FCE), qui avait été signé entre les membres de l’OTAN [6] et ceux du pacte de Varsovie, en 1990. Un nouveau pilier du contrôle des armements s’écroule. Mais l’Amérique a besoin de la Russie dans un autre dossier multilatéral, les négociations sur le nucléaire iranien. Une priorité absolue pour l’administration Obama. Le Joint Comprehensive Plan of Action (JCPoA) est signé en juillet. Moscou apprécie cette séparation des dossiers, qui vire parfois à la schizophrénie. Les Américains mettront du temps à l’intégrer.
À la tribune des Nations unies, fin septembre 2015, Vladimir Poutine s’en prend, une nouvelle fois, à l’exportation des révolutions. Au lieu du triomphe de la démocratie et du progrès, on a eu la violence, la pauvreté et le désastre social, prétend-il. Quelques jours plus tard, la Russie s’engouffre dans le vide relatif laissé par les États-Unis au Moyen-Orient. Elle accentue son opération de sauvetage du régime Assad en Syrie. Avec l’Iran et son sous-traitant, le Hezbollah libanais, la Russie emploie ses capacités aériennes et des bombardements indiscriminés – crimes de guerre avérés, une nouvelle fois – pour favoriser la reconquête territoriale. La lutte contre le terrorisme n’est qu’un prétexte vite oublié. Cette capacité de projection dans un conflit lointain n’est pas seulement le fait de l’armée russe, mais aussi d’un groupe privé, lié au Kremlin : les mercenaires de Wagner. Ses métastases vont se répandre dans des pays africains, par la suite. Et puis, il y a le champ cyber, où la Russie avance masquée.
En juin 2016, la campagne présidentielle bat son plein aux États-Unis. On apprend alors que les serveurs du Comité national démocrate ont été piratés. Les soupçons se portent sur des hackeurs russes. Le 22 juillet, trois jours avant l’ouverture de la convention démocrate qui désignera Hillary Clinton comme candidate, le site WikiLeaks publie près de 20 000 courriels internes. Ils montrent, notamment, que les cadres du parti ont voulu favoriser l’ancienne secrétaire d’État par rapport à Bernie Sanders. Au cours des mois suivants, qui vont conduire à la victoire de Donald Trump, la communauté du renseignement acquiert la conviction que la Russie a lancé une déstabilisation à fronts multiples pour que le milliardaire devienne président. Il reste difficile, à ce jour, de mesurer avec exactitude le rôle que Moscou a joué en faveur de Donald Trump, dont la victoire répond surtout à des ressorts sociaux et économiques intérieurs.
En raison de la suspicion permanente qui pèse sur le nouveau président dans ses rapports avec Moscou, rien de constructif ne se produit dans la relation bilatérale. Au contraire. Les listes des sanctions contre la Russie – ses personnalités et ses entreprises – s’étoffent. En février 2018, dans sa revue de posture nucléaire, l’administration américaine note que la Russie considère les États-Unis et l’OTAN comme les principales menaces pour ses ambitions géopolitiques contemporaines. Quelques semaines plus tard, à Salisbury (Grande-Bretagne), l’ancien agent double Sergueï Skripal est victime d’un empoisonnement avec un neurotoxique, le Novitchok. Le choc est puissant en Europe, le sentiment d’impunité habite les services russes. Le déni de Moscou est total, tandis que les expulsions de diplomates se multiplient, de part et d’autre.
En juillet 2018, le procureur spécial Robert Mueller accuse treize membres des services de renseignement russes (GRU) du piratage des serveurs démocrates. Quelques jours plus tard, Donald Trump et Vladimir Poutine se retrouvent à Helsinki, en tête à tête, sans témoins. Leur conférence de presse est lunaire. Le président américain lâche alors, au sujet des soupçons de ses propres services sur les ingérences russes : Le président Poutine dit que ce n’est pas la Russie. Je ne vois aucune raison pour laquelle ce serait elle.
En juin 2019, Vladimir Poutine accorde un entretien au Financial Times : La pensée libérale est devenue obsolète, lance-t-il, ne boudant pas son plaisir. L’intervention militaire en Syrie est une réussite, opérationnelle et politique. L’Europe se débat avec les répliques de la crise des migrants et la montée des populismes. Les États-Unis sont devenus un champ de bataille. Donald Trump néglige et humilie les alliés traditionnels de Washington et apprécie la compagnie des autocrates. Poutine pense en termes civilisationnels. Il croit à une décrépitude inéluctable de l’Occident, sur le plan de l’influence et des valeurs.
Le conflit dans le Donbass ukrainien est à moitié gelé. Il peut être réchauffé, si nécessaire. La Russie estime que Kiev ne remplit pas ses engagements, dans le cadre des accords de Minsk. Le sommet à Paris au format Normandie réunissant Russie, Ukraine, Allemagne et France, avec le nouveau président Volodymyr Zelensky, en décembre 2019, ne donne lieu qu’à de petits gestes symboliques. Sur le fond, Moscou voit plus grand, à l’échelle de l’histoire. Or, plus le temps passe, et plus Kiev semble s’ancrer à l’ouest. Les Américains, depuis 2014, ont lancé un vaste programme d’assistance sécuritaire, au profit de ce pays. Subir, c’est faiblir. Ainsi s’énonce le mantra de la Russie poutinienne.
En août 2020, l’opposant russe Alexeï Navalny est victime d’un empoisonnement avec un agent neurotoxique de type Novitchok. Un dramatique feuilleton commence alors autour de sa santé. Il finit par être évacué vers l’Allemagne. Non seulement Moscou nie la tentative d’assassinat, mais il s’enveloppe dans des mensonges épais. Le crime et son déni provoquent une prise de conscience, à Paris et à Berlin, hélas bien tardive. Oui, le Kremlin est prêt à tout lancer, ou tout couvrir, si cela sert ses intérêts.
La victoire de Joe Biden à l’élection présidentielle américaine replace, face à Moscou, un interlocuteur démocrate classique, croyant dans les vertus du lien transatlantique. Poutine est-il un tueur ? demande-t-on à l’élu, à la télévision. Oui, je le crois. La rencontre entre les deux dirigeants à Genève, à la mi-juin, traduit néanmoins, croit-on alors, une volonté pragmatique d’avancer ensemble sur quelques sujets en commun.
Le nouvel élu à Washington ne jouit d’aucun état de grâce. L’assaut contre le Capitole par les partisans de Donald Trump, en janvier 2021, puis le retrait chaotique d’Afghanistan, en août, sont deux reflets puissants des vulnérabilités américaines. Bien reçues à Moscou, et non sans satisfaction. Ces images ont confirmé la grille de lecture géopolitique du Kremlin : la chute de l’Amérique offre des ouvertures aux puissances audacieuses. L’absence d’interactions directes entre dirigeants, en raison de la pandémie de Covid-19, solidifie les certitudes idéologiques. Face à une Amérique fracturée, affaiblie, dirigée par un président prévisible et âgé, l’appétit russe grandit, encore.
On a beaucoup prêté aux Russes une inventivité folle. Mais ce sont surtout les faiblesses européennes et américaines qui ont été criantes, marquées par un refus d’affronter de face les ambitions de Moscou. Quant à la propagande, l’usage éhonté du mensonge et de la manipulation, c’est le propre de tous les régimes autoritaires et dictatoriaux, qui se nourrissent de l’adversité réelle ou inventée pour raffermir leurs fondations. De même, on a beaucoup insisté sur l’arsenal balistique et nucléaire dont dispose la Russie, il est vrai inquiétant, à commencer par les missiles hypersoniques dernier cri. Mais l’opération en Ukraine laisse planer des doutes sur l’excellence de cette armée, sur le plan organisationnel.
Ces dernières années, c’est l’effacement de la distinction entre guerre et paix, la capacité des Russes à s’engager dans les zones grises, les interstices, qui ont longtemps déstabilisé les Occidentaux, perpétuellement sur la défensive. Ce n’est plus le cas. Le front commun des États-Unis et des Européens face à la guerre en Ukraine est d’une intensité, d’une vigueur sans précédent. Les sanctions qui frappent Moscou, inédites. La Russie rêvait de revanche historique. Elle est seule, isolée, menacée d’un effondrement économique. À sa tête se trouve un homme plein d’amertume et de mots acides, dont la paranoïa ne semble plus être un exercice rhétorique. Un homme de 69 ans qui avait promis à son peuple la stabilité et la renaissance et lui offre aujourd’hui une guerre injustifiable. Elle ressemble à une bombe posée sous son propre fauteuil. On ignore la longueur de la mèche.
Piotr Smolar, correspondant du Monde à Washington. Le Monde du 6 03 2022
Rendez-vous à l’évidence : Poutine croit qu’il est juste de nous tuer.
Lorsque je me suis réveillé ce jeudi matin-là [24 février], c’était la guerre en Ukraine et cela m’a fait un choc mais je n’éprouvais aucune surprise, plutôt la même chose qu’à la mort d’un proche après une longue maladie. La voie que suivrait un jour le maître de la kleptocratie kremlinienne était aussi prévisible que le sort d’un patient atteint d’un cancer du pancréas.
Nous autres Slovaques, nous savons exactement ce que cela signifie d’être libérés par nos frères slaves russes. Ils sont venus nous sauver de l’impérialisme en 1968, lorsque nous croyions naïvement que nous pouvions décider du sort de notre pays. S’ensuivirent deux décennies d’occupation. Quelques-uns d’entre nous se firent descendre alors que nous n’opposions aucune résistance. C’est là notre stratégie nationale millénaire de survie – nous ne combattons pas -, vous n’êtes pas obligés de tuer pour nous asservir. Les Russes nous tuaient, juste par principe. Que serait en effet une occupation sans meurtres ?
Si le régime soviétique ne s’était pas effondré, nous serions encore aujourd’hui sous occupation russe. Nous continuons à vivre avec ses conséquences mentales et culturelles. La société slovaque se divise en russophobes et russophiles, ce qui fait éclater les anciennes amitiés et les familles. Même trente ans après que le dernier soldat russe a quitté notre pays, nous n’avons pas réussi à extraire la propagande soviétique des cerveaux d’une bonne moitié de la population. Et c’est justement cela qui nous permet de toujours savoir la déchiffrer. Nous connaissons précisément le fond de la pensée de tout représentant du Kremlin, lorsqu’il ment. Nous savons qu’il ment parce qu’il remue les lèvres.
Commençons par le fait que l’Ukraine n’est pas l’objectif final de Vladimir Poutine. Ce n’est que son premier pas. Si nous ne l’arrêtons pas là, il s’en prendra aussi à nous. Cela lui prendrait un peu plus de temps d’atteindre Paris que Bratislava, mais soyez-en sûrs, lui aussi rêve de photos avec ses généraux et la tour Eiffel en arrière-plan. Cela paraît fou ? Sûr, c’est fou. Mais on pourrait un jour aisément trouver dans le dictionnaire cette définition de la stupidité suicidaire : ne pas prendre au sérieux un fou dangereux parce qu’il a des objectifs insensés.
En outre, Poutine n’est fou que si nous essayons de le mesurer à notre aune. Sinon, il n’est que le représentant particulièrement représentatif de la Russie. En témoignent les sondages selon lesquels sa popularité intérieure n’a pas baissé depuis le déclenchement de la guerre, mais a connu au contraire un net rebond. Et même auparavant, elle était à un niveau dont les leaders occidentaux les plus populaires n’auraient jamais osé rêver.
Le cerveau du Russe moyen mijote sans cesse dans une propagande d’État toxique qui lui serine que sa responsabilité historique est de sauver le monde, de protéger les valeurs traditionnelles contre la pourriture de l’aliénation démocratique et la tolérance débridée de l’Occident. L’Europe doit être punie et ramenée à la raison par la force, les États-Unis transformés en un désert calciné. Ce n’est pas Poutine qui parle ainsi, évidemment. Ce sont les idéologues et les propagandistes du Kremlin qui le disent pour lui dans les médias à la botte de l’État ; en Russie, il existe fort peu de médias indépendants et ils ont une très faible portée. Une majorité écrasante de la population se représente le monde en fonction d’une propagande messianique agressive.
La seule surprise réelle est que même Poutine a fini par croire à ses propres mensonges. À l’origine, il ne défendait aucune idéologie, seulement ses propres intérêts. Nombreux sont ceux qui ont pris cela pour un pragmatisme calculateur, rationnel et prévisible. Car à la différence d’un terroriste fanatique, on peut tout de même s’entendre avec un criminel, n’est-ce pas ?
Les souverains de la Russie ont toujours traité même leur propre pays comme un territoire ennemi conquis. Ils l’ont pillé sans scrupule, régnant sur le peuple par la terreur. D’Ivan le Terrible jusqu’à Poutine en passant par Staline, le mode de gouvernance n’a pas changé. Le servage y a été aboli au XIX° siècle, mais la mentalité servile n’y a pas disparu. La vie en Russie est un jeu dont le score est zéro. Si vous n’opprimez pas, vous êtes opprimé. Tout profit réalisé par autrui constitue votre perte. Celui qui n’est pas prêt à tout prendre n’aura rien.
La nouvelle élite kleptocrate de Poutine s’est fabuleusement enrichie en pillant l’État. Derrière chaque bien immobilier luxueux sur la Côte d’Azur, propriété d’un oligarque russe, il y a quelque part en Russie des gens qui sont morts prématurément dans la pauvreté, l’ignorance, sans service adéquat de santé ni aucune chance réelle d’améliorer leur statut. Les pelouses soigneusement entretenues des villas de luxe aux alentours de Cannes ou de Saint-Tropez sont arrosées avec des larmes, voire plus d’une fois avec du sang.
L’État n’a plus aucune ressource pour se développer. Les écoles, les hôpitaux, les routes et les habitations humaines en dehors de Moscou et Saint-Pétersbourg sont dans une situation comparable à ceux des régions arriérées d’Asie. La capacité de la Russie à produire quoi que ce soit de plus sophistiqué qu’un baril de pétrole brut est particulièrement bien illustrée par l’histoire de la limousine présidentielle de Poutine. Sa conception a demandé un investissement de 400 millions d’€, le dictateur s’en sert même parfois, mais on n’a jamais lancé sa fabrication en série. En la voyant, vous comprendrez pourquoi.
L’armée russe est dans le même état que le pays. Les généraux volent en grand, les sergents en petit et le simple soldat, s’il veut manger, vole la nourriture là où il peut parce que les commandants dérobent la nourriture des hommes par camions entiers. Il est pratiquement impossible de mener une guerre efficace avec une telle armée. Dans la mesure où vous ne disposez pas de l’arme nucléaire. Poutine en dispose. Nous reviendrons sur ce point.
L’erreur de Poutine est d’avoir cru à sa propre propagande, dont le but originel était de fournir aux Russes une sorte de succédané à la prospérité. Le dictateur ne se doute pas aujourd’hui de ce à quoi ressemble la Russie. Pas uniquement parce que cela fait bien dix ans qu’il n’a pas entendu le mot non. Cela fait bien dix ans qu’il n’entend que des informations qui n’altèrent pas son humeur : la Russie est-elle puissante ? La plus puissante. Et l’Occident ? Pourri, faible, incapable de vivre ! Notre mère la Russie peut-elle sauver le monde ? Elle le peut et le doit ! Comment ? Par la force des armes de son invincible armée ! Poutine vit dans un univers dont les règles ont été écrites par un J.R.R. Tolkien schizophrène et paranoïaque drogué à la métamphétamine. Il a fini par croire que son devoir est de détruire l’Occident et d’établir un nouvel ordre mondial. Il vient de commencer. Si nous ne voulons pas qu’il réussisse, nous devons l’arrêter. Maintenant.
Oui, ce sera dangereux. Poutine a des armes nucléaires. Il dit clairement qu’il les emploiera s’il le faut. Il ne menace pas, il ne fait pas de chantage. Il nous informe sans ambages que si nous nous opposons à lui il essaiera de nous tuer. L’usage de l’arme nucléaire n’est pour lui qu’un des moyens possibles d’y parvenir. Il ne le privilégie pas parce qu’il a conscience du coût que cela implique. Il serait obligé de perdre encore quelques millions de vies russes. Ce serait pour lui une décision relativement compliquée et douloureuse, tout comme de payer 400 millions d’€ pour une limousine affreuse et mauvaise. Le terme ressources humaines a somme toute en Russie une autre signification qu’en Europe. Les gens ne sont qu’une des ressources que le chef politique peut dépenser à sa guise. Les étrangers ne sont pas des ressources, mais des inconvénients dont il faut se débarrasser.
Ce jeudi matin-là nous nous sommes tous réveillés avec la guerre. Potentiellement la dernière que déclenchera notre espèce, nous devrions sûrement en être conscients. Nous n’avons pas choisi cette guerre. Nous ne l’avons pas commencée, nous ne la voulons pas, mais nous n’avons pas d’endroit où lui échapper. Elle viendra nous chercher. Poutine s’en prendra aussi à vous, parce qu’il le veut et le peut et qu’il croit que c’est juste.
La guerre est l’essence du mal. Nous pouvons y mourir. Nous serons peut-être nombreux à y mourir. Si nous refusons de nous y battre, alors ce sera la mort assurée.
Arpad Soltesz est directeur du Centre slovaque de journalisme d’investigation Jan-Kuciak et romancier. Le Monde du 10 mars 2022. Traduit du slovaque par Barbora Faure.
Cette interview date du 10 mars 2022
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Yvan Colonna, le présumé assassin du Préfet Érignac, est tabassé dans la salle de sport de la prison d’Arles, pendant neuf minutes, sans que personne n’intervienne pour faire cesser l’agression. Il en mourra trois semaines plus tard. Le taux d’absentéisme du personnel de la prison est alors de 50 % ! Comment peut-on travailler normalement dans de pareilles conditions ?
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Francis Kéré, architecte burkinabé installé à Berlin, reçoit le prix Pritzker, équivalent d’un Nobel pour l’architecture, des matériaux locaux, du bon sens à revendre, de l’élégance… Il reprend, en les adaptant au contexte du XXI° siècle, les deux ou trois principes essentiels mis en œuvre par les colons de l’entre deux guerres : de l’ombre, du courant d’air, principes jetés à la poubelle à partir des années 70 par l’utilisation – par les riches – d’une climatisation ruineuse et énergivore.
Ecole de Dano
Ecole primaire de Gando, Burkina Faso
En France, l’entreprise Cycle Terre à Sevran fermera ses portes en 2024 : essuyer les plâtres peut mener à la faillite.
10 04 2022
Jamais un premier tour d’élections présidentielles en France, n’aura été aussi freudien : une fille qui tue son père, un garçon qui épouse sa mère. Et tout ça ça fait d’excellents français.
15 04 2022
La pandémie du Covid 19 aura mis en valeur l’incapacité radicale de la plupart des pays d’Afrique à gérer convenablement des stocks : le Kenya détruit 840 000 doses de vaccin Astra Zeneca, acheminés par Covax, faute de moyens logistiques pour les distribuer, faute de délai suffisants vu les dates de péremption qui se rapprochent, et même faute de demandeurs, car sont encore très nombreux ceux qui refusent la vaccination etc … Le Kenya est le quatrième pays à procéder ainsi, après le Nigeria, Soudan du Sud, Malawi. Ainsi on aura vu tous ces pays se plaindre amèrement d’être les oubliés de la distribution des vaccins et, une fois ceux-ci reçus, ne pas savoir qu’en faire ! ! !
21 04 2022
Au lendemain du débat Emmanuel Macron-Marine Le Pen, Anne Sophie Lapix, frustrée de ne pas avoir été choisie pour ce débat, selon le souhait exprimé par les deux candidats, reçoit à Antenne 2 Emmanuel Macron, avec des couteaux bien aiguisés sur ses notes, et à sa question : la solidarité à la source, le versement automatique des aides à ceux qui y ont droit, c’est une mesure sociale ou une mesure économique ? Emmanuel Macron lui renvoie un : Les deux mon général et enchaine aussitôt sur un fou-rire, à même d’entraîner l’ensemble des téléspectateurs. Anne-Sophie Lapix, qui se croyait jusqu’alors assise sur du granit, découvre, oh stupéfaction ! qu’elle est le cul par terre, sur ce qui reste d’un tas de sable qui vient de s’écrouler. Il est bien possible que ce gag énorme ait assuré le succès de sa réélection cinq jours plus tard. Mais, en rediffusion, nul ne pourra revoir le fou-rire : coupé, censuré par ces messieurs-dames les journalistes… comme chez Poutine.
24 04 2022
Emmanuel Macron est réélu président de la République pour un second mandat avec 58.54 % des voix. Le phénomène Zemmour, fabriqué de toutes pièces par des médias qui sont allés jusqu’à lui attribuer un score supérieur à celui de Marine Le Pen, sur la base de sondages parfaitement bidons, explose en plein vol. Fini, lessivé l’agité du bocal qui n’avait aucun ancrage réel, tout juste bon à faire le buzz sur les plateaux télé. Pour les médias, c’est rien, juste un accident de parcours…. et maintenant autre chose…
9 05 2022
À Strasbourg, Emmanuel Macron met en garde contre la tentation de l’humiliation et l’esprit de revanche envers la Russie. Trois mois plus tôt, celle-ci envahissait l’Ukraine. Et un mois plus tard, le 3 juin, il remettra le couvert : Il ne faut pas humilier la Russie pour que, le jour où les combats cesseront, nous puissions bâtir un chemin de sortie par les voies diplomatiques. Je suis convaincu que c’est le rôle de la France que d’être puissance médiatrice.
L’ambassadeur de l’Ukraine en France, Vadym Omelchenko répond dans le Monde : Dire qu’il ne faut pas humilier le tyran, cela ne peut que renforcer le tyran. Cela annihile tous les gestes de solidarité que la France fait pou l’Ukraine sur le plan militaire, humanitaire, diplomatique et judiciaire…
4 05 2022
À Uvalde, au Texas, un adolescent de 18 ans tue 19 enfants, 2 adultes dans une école primaire. Il venait d’acheter ces armes sans aucune difficulté, quelques semaines plus tôt pour fêter ses 18 ans. Qu’il y ait des fous pour commettre des crimes, c’est une histoire qui remonte aux origines des temps… mais qu’une grande nation moderne, étendard de la démocratie, se refuse à tout prix à prendre les dispositions pour interdire cette vente libre des armes, et c’est d’une véritable pathologie collective qu’il s’agit qui demanderait une psychothérapie nationale, si cela pouvait exister.
27 05 2022
Une Peugeot 307 SW, achetée neuve en 2006, appartenant à Fabrice Gommé, habitant dans l’Oise à Fournival, près de Saint Just en Chausée, se dirige vers les siège de la marque, à Montbéliard : à l’arrivée, elle aura 1 000 000 – un million – de kilomètres ! Un splendide pied-de-nez aux contempteurs de la soi-disant obsolescence programmée. Moteur d’origine de 1.6 litres, 92 cv. Depuis 2006, cela fait une moyenne de 66666 km/an. Quelle publicité pour Peugeot ! Publicité certes, mais à double tranchant car il n’est pas du tout certain qu’actionnaires et dirigeants aient vu cela d’un bon œil : et si Fabrice Gommé faisait exemple et que le nombre de propriétaires poussant leur voiture à près d’un million de km, eh bien nous n’aurions plus qu’à ralentir les cadences de fabrication… et, pour finir, à gagner moins d’argent même si nous ne programmons aucune obsolescence !
29 05 2022
François Gabart baptise son nouveau géant des mers SVR Lazartigue avec un record de la traversée de la Méditerranée, de Marseille à Tunis, en 13 h 55′ 37″. Il n’ a pas respecté une règle imposée par le règlement des Ultimes pour la Route du Rhum (une histoire de winch qui ne doit pas être à l’intérieur du bateau mais sur le pont) et quand viendra cette route du Rhum, en novembre 2022, il sera accepté par dérogation, mais l’affaire aura gonflé au point de semer une belle zizanie au sein des Ultimes.
29 05 2022
Finale de foot de la Ligue des champions Liverpool-Real de Madrid, au stade de France : malgré le déploiement de 7 000 policiers pour encadrer tout ça, c’est une ahurissante pagaille, avec brutalités policières etc…
Depuis longtemps, je fuis les foules. Je les évite. Je sais que tout ou presque est venu d’elles. Je veux dire le mauvais, la guerre, et tous les Kaserskwirs que celle-ci a ouvert dans les cerveaux de beaucoup d’hommes. Moi, je les ai vus les hommes à l’œuvre, lorsqu’ils savent qu’ils ne sont pas seuls, lorsqu’ils savent qu’ils peuvent se noyer, se dissoudre dans une masse faire de milliers de visages taillés à leur image. On peut toujours se dire que la faute incombe à celui qui les entraîne, les exhorte, les fait danser comme un orvet autour d’un bâton, et que les foules sont inconscientes de leurs gestes, de leur avenir, et de leur trajet. Cela est faux. La vérité, c’est que la foule est elle-même un monstre. Elle s’enfante, corps énorme composé de milliers d’autres corps conscients. Et je sais aussi qu’il n’y a pas de foules heureuses. Il n’y a pas de foules paisibles. Et même derrière les rires, les sourires, les musiques, les refrains, il y a du sang qui s’échauffe, du sang qui s’agite, qui tourne sur lui-même et se rend fou d’être ainsi bousculé et brassé dans son propre tourbillon.
Philippe Claudel. Le rapport de Brodeck. Stock. 2007
06 2022
On peut trouver dans le sud de la France des Anglais tellement bien intégrés qu’ils abandonnent toute la réserve habituellement attachée aux étrangers pour se livrer à un humour so british : ainsi, vu à Mirepoix, petite ville à l’est de Saint Gaudens, sous de magnifiques couverts, sur la devanture d’un magasin de jouets tenu par des Anglais : les enfants qui seront surpris hors de la surveillance de leurs parents seront aussitôt capturés et vendus au cirque. So british.
14 06 2022
Le terrorisme sévit à Seytenga, dans le nord-est du Burkina Fasso : au moins 79 morts.
19 06 2022
Le parti d’Emmanuel Macron remporte les élections législatives, avec une majorité relative mais surtout avec une très forte abstention : 53,77 %. Et la quasi totalité des journalistes, dans un splendide déni de réalité, parlent de lourde défaite du parti présidentiel, totalement incapables d’envisager que la France puisse se retrouver désormais dans la situation de la plupart des démocraties européennes qui, ma foi, s’en accommodent en pratiquant le compromis…. tellement contraire à la culture politique à la française.…
22 06 2022
Séisme en Afghanistan, au sud de Kaboul, près de la frontière avec le Pakistan, – région de Paktika -, d’une magnitude de 5.9 : plus de 1 000 morts, 3 000 blessés.
24 06 2022
La Cour suprême des États-Unis supprime le droit à l’avortement, garanti depuis cinquante ans dans tout le pays. Désormais, chaque État est libre de décider de sa législation sur l’IVG : une vingtaine d’entre eux décident de l’interdire et dans ce cas, les demandeuses devront se rendre dans les États qui l’autorisent.
06 2022
La France tient un nageur comme jamais : Léon Marchand, de Toulouse, qui s’entraîne en Arizona auprès du coach de Michaël Phelps, Bowman. Il rapporte des championnats du monde de Budapest, en Hongrie trois médailles : 2 en or – 400 m. 4 nages, 200 m. 4 nages et une en argent : 200 mètres dos. Il y a bien longtemps que la natation française n’avait sorti un tel phénomène.
le garçon confirmera son immense talent aux J.O de Paris 2024
12 07 2022
Le feu part dans la forêt des landes, qui va dévorer en 8 jours 20 900 ha, obligeant à évacuer 34 000 personnes, pour la plupart en vacances dans des campings.
La dune du Pilat au 20 juillet 2022
Juillet 2022 Des Africains séquestrés par la mafia chinoise pour arnaquer des Occidentaux.
De plus en plus d’Africains sont piégés par des cartels qui ont élu domicile dans une vaste zone entre la Birmanie, le Laos et le Cambodge, où ils servent de petites mains dans des cités dévolues à la cyberfraude.
Tout a commencé par le bouche-à-oreille. Début 2022, Bridget Motari s’ennuie dans une école d’hôtellerie de la ville d’Eldoret, dans l’ouest du Kenya. Cette étudiante de 22 ans rêve d’ailleurs, de salaires plus généreux que ceux que son pays peut lui offrir. Une connaissance l’informe d’une campagne de recrutement pour des emplois de services clients en Thaïlande payés l’équivalent de plus de 900 euros par mois. Elle saute sur l’occasion, quand bien même l’agence de recrutement ne lui inspire pas confiance. Ce fut la pire décision de ma vie, soupire la rescapée, que Le Monde a rencontrée en mai à Nairobi.
À son arrivée à Bangkok, en juillet 2022, il n’y aura ni emploi ni salaire. Piégée par une mafia chinoise, elle voit son destin basculer. Le voyage en enfer durera quatre mois, durant lesquels la jeune femme sera transférée de force à Van Pak Len, au Laos, dans la province de Bokeo, au sein de la zone économique spéciale du Triangle d’or. Elle y est séquestrée et exploitée, dans l’un des vastes centres d’arnaques en ligne qui pullulent dans ce point névralgique de la cybercriminalité mondiale. De nombreux Africains se retrouvent pris au piège et servent de petites mains dans ces cités de l’Asie du Sud-Est dévolues à la cyberfraude.
Selon les estimations de l’Institut des États-Unis pour la paix, groupe de réflexion américain, le nombre de captifs de ces cartels chinois qui ont élu domicile dans une vaste zone entre la Birmanie, le Laos et le Cambodge atteindrait 305 000 personnes, en grande majorité des Asiatiques. Ancienne plateforme du trafic d’opium, ce territoire s’est transformé en un haut lieu de l’extorsion en ligne au moment de la pandémie de Covid-19. Des groupes criminels liés aux triades chinoises prospèrent dans cette zone rendue presque inaccessible par la guerre civile en Birmanie et la complicité des élites locales.
Parmi eux, on retrouve une figure du crime organisé chinois, Wan Kuok-koi, chef historique de la Triade 14 de Macao, également connu sous son nom de guerre Dent cassée. Autre grand nom de la cyberfraude, le magnat cambodgien Ly Yong Phat, qui fut conseiller économique spécial de l’ancien premier ministre Hun Sen, est placé sous sanctions américaines depuis septembre pour violations des droits humains liées au traitement de travailleurs soumis au travail forcé dans des opérations d’escroquerie aux investissements en ligne.
Cette industrie florissante a un nom : le pig butchering (dépeçage de porc), qui consiste à engraisser des victimes en ligne avant de leur soutirer des fonds par le biais de sites de cryptomonnaie. L’activité aurait rapporté environ 75 milliards $ depuis 2020 (soit environ 69 milliards €), selon une étude de l’université du Texas publiée en mars et intitulée Comment les cryptomonnaies financent-elles l’esclavage ? L’économie du dépeçage de porc .
Séduire des hommes en ligne pour mieux les escroquer, telle est la tâche à laquelle a dû se plier Bridget Motari. Elle a accepté de retracer son périple sous sa véritable identité, contrairement aux autres rescapés, qui préfèrent témoigner de façon anonyme, terrifiés à l’idée d’être identifiés et soumis à d’éventuelles représailles.
À son arrivée à Bangkok, la Kényane s’attend à rejoindre une entreprise de commerce en ligne. Un homme au volant d’un van m’a récupérée, il a conduit le lendemain pendant de longues heures, on a traversé une rivière en bateau. A ce moment-là, je ne me doutais de rien, je me croyais encore en Thaïlande, raconte-t-elle. Elle est en fait passée au Laos. Selon le récit qu’elle donne de ce périple, des inconnus la conduisent alors dans l’un des milliers de complexes dévolus à la fraude en ligne. À l’intérieur, on trouve des open spaces où sont installés les centres d’arnaque et des dortoirs où sont logés les travailleurs.
Dans le cas de la Birmanie et du Cambodge, on peut clairement parler de camps de travail et de captifs, dans la mesure où téléphones et passeports sont confisqués. Il est impensable de quitter ces complexes, entourés de hauts murs d’enceinte surmontés de fils barbelés et gardés par des miliciens. L’un de ces lieux, à Tai Chang, dans le sud de la Birmanie, est surnommé l’enfer sur Terre par celles et ceux qui y ont séjourné.
Dans cet univers carcéral, l’unique moyen d’obtenir un bon de sortie consiste à remplir les objectifs fixés par les mafias afin de pouvoir rembourser sa dette – ou bien, comme de rares ressortissants africains l’ont fait, rassembler assez d’argent pour payer une rançon. J’étais terrifiée, les patrons disaient que si je voulais quitter ce pays et rentrer chez moi, je devais rembourser la somme qu’ils avaient investie sur moi pour m’amener ici. La seule façon de s’en sortir est de coopérer, témoigne Bridget Motari, qui sera elle-même vendue à une autre mafia au Laos au bout d’un mois, après avoir été jugée insuffisamment productive.
Sous la contrainte, les victimes se transforment en escrocs. Je devais avoir au moins cinq cibles potentielles par jour, dévoile la jeune femme. Elle se trouve forcée de travailler plus de quinze heures par jour, souvent de nuit, afin de s’adapter aux fuseaux horaires américains. Elle détaille son quotidien : On te donne un ordinateur et quatre téléphones, tu crées des faux profils sur Instagram, Telegram, Tinder ou Facebook. Ils te disent de récupérer des images de femmes, souvent russes, la trentaine, plutôt belles, où on les voit chez elles, à la piscine, en cuisine, etc. À partir de ces photos, tu inventes une fausse histoire, une fausse carrière, une fausse enfance et un faux divorce.
Des logiciels d’intelligence artificielle sont spécialement développés par les ingénieurs informatiques chinois pour mieux tromper les cibles, généralement des hommes occidentaux, américains de préférence. Le but, c’est qu’ils tombent amoureux, résume Bridget Motari. Une fois l’hameçon mordu, un investissement en cryptomonnaie est proposé à la cible. Les ingénieurs chinois prennent le relais et soutirent de l’argent grâce à un lien piégé qui siphonne les virements. En 2023, ces arnaques ont coûté près de 4 milliards $ à des dizaines de milliers d’internautes américains, selon les estimations du FBI.
Gare à ceux qui ratent les objectifs. C’est comme une prison, confie une Kényane de 42 ans qui a passé six mois dans un camp au Laos. Les employés sont terrifiés car s’ils ne sont pas efficaces, les patrons les battent. Tous types de sévices y sont pratiqués. Au début, j’ai refusé de travailler, mais les gardiens m’ont attaché à une grille et m’ont battu, lâche, des sanglots dans la voix, un Marocain piégé en Birmanie. Une jeune Zambienne a assisté à des scènes de torture, elle a vu un Tanzanien installé sur une chaise électrique. Les captives d’origine asiatique sont parfois contraintes de se prostituer. Des travailleurs vont jusqu’à subir des ablations d’organes, affirme l’organisation caritative Blue Dragon.
Grace Mata en a-t-elle fait les frais ? Cette Kényane de 22 ans est morte dans de mystérieuses circonstances en 2022 dans le camp de KK Park, le plus grand complexe de cyberfraude de Birmanie. Malade, la jeune femme a subi une intervention chirurgicale dans une clinique improvisée installée au sein de ce lieu où travaillent plusieurs milliers de personnes. Global Alms, une organisation australienne de soutien aux victimes, estime que l’opération chirurgicale était destinée à lui prélever un rein.
Sa dépouille a été rapatriée par l’intermédiaire de l’ambassade du Kenya en Thaïlande, qui participe aux opérations d’extraction des ressortissants africains piégés par les groupes criminels dans la région. Il n’y a que six ambassades africaines en Thaïlande, donc le Kenya vient au secours de citoyens africains de différentes nationalités, indique l’ambassadeur kényan, Kiptiness Lindsay Kimwole. Ses services ont assisté des Ougandais, des Éthiopiens, des Zimbabwéens, des Marocains et des Burundais.
Jusqu’en 2022, l’enrôlement de ces jeunes Africains se faisait directement sur le continent par de fausses agences de recrutement. Au Kenya, le principal trafiquant a été identifié en 2023 et son réseau démantelé. Wycliffe Onguti Magara, qui avait recruté Bridget Motari et des centaines d’autres à Nairobi, se cache aujourd’hui aux Emirats arabes unis et se trouve sous le coup d’une notice rouge d’Interpol. Pourtant, les recrutements continuent, les Africains arrivent toujours par centaines en Birmanie, observe Kiptiness Lindsay Kimwole. Maintenant, tout se passe en ligne, ils utilisent les captifs pour en attirer d’autres.
En janvier 2023, une Zambienne de 27 ans travaille dans une institution de microfinance à Lusaka quand elle reçoit une offre provenant d’un inconnu, dans sa messagerie Facebook, pour un poste de service clients à distance. Un mois plus tard, elle atterrit à Bangkok puis est conduite en Birmanie contre son gré. Au KK Park, son CV intéresse ses ravisseurs. Il lui est demandé non pas de séduire des hommes en ligne, mais de se transformer en chasseuse de têtes. Pour chaque personne que vous recrutez avec succès, vous recevez 1 000 $. Pour obtenir ma liberté, j’ai dû recruter d’autres personnes, explique-t-elle, en pleurs, par écrans interposés.
On lui promet de la relâcher si elle rassemble la somme de 10 000 $. On cherche des individus en ligne, on trie les profils les plus intéressants sur les réseaux sociaux, puis on les contacte. En priorité des Asiatiques et des Africains [anglophones]. Le deuxième mois, j’ai recruté un Ghanéen et un Zimbabwéen. Une fois sur place, le mec ghanéen était hors de lui, il m’a dit : Comment as-tu pu me faire ça ? Je lui ai répondu : Écoute, si tu veux être libre, tu n’as pas le choix, tu dois faire la même chose que moi.
De fait, ce nouveau mode de recrutement rend plus difficile la chasse aux fausses annonces. C’est un cas de figure inédit, analyse Mercy Otieno, chargée de la protection au sein de l’ONG Haart. Basée au Kenya, la structure lutte contre le trafic d’être humains et traite en majorité les nombreux cas de femmes travaillant comme domestiques dans les pays du Golfe. Contrairement au Golfe, ici toutes les victimes sont des diplômés d’université. Il y a autant de femmes que d’hommes. Leur point commun, c’est d’avoir déjà un travail. Ils acceptent les offres car ils veulent augmenter leur salaire, note-t-elle.
Si leur profil surprend en Afrique en raison de leur niveau d’études, ces nouvelles victimes du trafic d’êtres humains font presque partie du paysage en Asie du Sud-Est. À chaque fois que nous voyons des Africains arriver à l’aéroport de Bangkok, nous savons vers où ils se dirigent, a confié un agent de l’immigration en Thaïlande à la jeune Zambienne dupée en Birmanie. Après s’être échappée de son camp puis avoir été secourue par l’Organisation internationale pour les migrations, elle a pu être rapatriée dans son pays en juin 2023.
[1] Eteri Tutberidze est l’entraineuse de Kamila Valieva. Est-ce à elle ou à son chorégraphe Daniel Gleikhengauz que revient le choix de In Memoriam comme musique de la prestation de Kamila Valieva ? Peu importe, celui ou celle qui a fait ce choix a fait preuve d’un gros culot, car du culot il en fallait pour choisir cette musique écrite par Kirill Richter pour les défunts et la proposer pour une épreuve de patinage artistique en libre.
[2] La trimétazidine est une substance utilisée pour soigner les angines de poitrine et interdite par l’Agence mondiale antidopage (AMA) depuis 2014, car elle favoriserait la circulation sanguine. Son père en prenait régulièrement. Le 29 janvier 2024, elle sera condamnée par le Tribunal arbitral du sport, la juridiction suprême du monde sportif à 4 ans de suspension à compter du 25 décembre 2021. Le TAS qui avait été saisie par l’Agence mondiale antidopage – AMA -, lassée des lenteurs de la procédure russe. Elle a la possibilité de faire appel auprès du tribunal fédéral suisse dans les 30 jours suivants.
[3] Vladimir Poutine s’était impliqué personnellement dans l’organisation de Jeux Olympiques d’hiver en février 2014 à Sotchi et il avait fait appel fréquemment à Jean-Claude Killy pour le conseiller. D’où des relations quasi amicales, amenant Jean-Claude Killy à parler de lui comme d’un type bien, ce qui lui vaudra d’être remercié du Comité international Olympique.
[4] Les temps changent certes, mais on peut néanmoins se souvenir, qu’il y a soixante ans de cela, tous les pays de l’Europe occidentale, libre, s’étaient rangés comme un seul homme derrière John Kennedy, président des États-Unis d’Amérique, qui avait estimé insupportable que des missiles russes soient pointés sur les États-Unis depuis Cuba, et donc, ainsi en avait décidé John Kennedy dans sa zone d’influence, et Khrouchtchev avait perdu ce bras de fer. En 2022, c’est Vladimir Poutine qui se retrouve dans la position de Kennedy il y a soixante ans, avec, dans sa zone d’influence un OTAN qui outrepasse ses prérogatives, installe une base sur le sol ukrainien, entraine l’armée ukrainienne etc… On pourrait peut-être faire un petit effort pour refuser de s’aligner systématiquement sur les États-Unis, qui ne sont pas vraiment le chevalier blanc qu’ils veulent faire croire. Ce qui pèse un peu à l’OTAN, ce sont les États-Unis, dont l’aide militaire à l’Ukraine est 100 fois plus élevée que celle de la France.
[5] 60 mètres est une limite de plongée humaine en eau libre en respirant de l’air, et ceci n’exclut pas les paliers de décompression en remontant ; mais l’homme peut plonger jusqu’à 100 mètres avec un mélange où l’azote de l’air est replacé, grosso modo, par l’hélium, à condition de disposer d’une tourelle qui le ramène en surface où il fera sa décompression dans un caisson hyperbare, au sec, avec la possibilité de boire et se nourrir.
[6] L’OTAN entraine l’armée ukrainienne depuis 2014.